Title: L
1Lhyperoxaliurie primaire du chat
21. Présentation
- Maladie héréditaire rare (découverte en 1984)
touchant les chats âgés de 4 à 9 mois - Pas de prédisposition raciale
- Insuffisance rénale aiguë provoquée par des
dépôts de cristaux doxalate dans les tubules
rénaux - Signes neurologiques associés à laccumulation de
neurofilaments dans les cellules nerveuses - Etat se dégrade rapidement une fois la pathologie
cliniquement déclarée - Affection féline analogue à loxaliurie primaire
de type II humain (déficience enzymatique en
D-glycérate déshydrogénase, de lacide
L-glycérique dans les urines et une
néphrolithiase récurrente).
32. Etude génétique
- Mode de transmission de la maladie de type
autosomique récessif - Il faut 2 gènes (un de la mère et un du père)
pour que le chaton soit atteint, la maladie est
donc difficile à éradiquer - Maladie peut disparaître sur plusieurs
générations et réapparaître après reproduction
entre deux individus porteurs - Tous les animaux atteints ne doivent pas être
utilisés en reproduction - Sur 16 chatons atteints 11 mâles, 5 femelles
- Parmi les non atteints, 10 mâles et 14 femelles
- Donc, ce gène nest ni lié au sexe, ni limité au
sexe (c2, avec correction de Yates et pour un
degré de liberté 1.842,Pgt0.1).
4Pedigree de chats atteints dhyperoxaliurie
primaire
Au sein dune colonie de chats domestiques à
poils courts, 16 animaux ont été reconnus
atteints dhyperoxaliurie primaire. Bien que le
croisement dorigine nait pas été mis en
évidence, lanalyse généalogique a révélé quils
appartenaient bien à la même famille.
53. Physiopathogénie
- Activité de plusieurs enzymes hépatiques chez des
chats malades comparée à celle de sujets sains
apparentés et non apparentés - Résultats de létude
- La D-glycérate déshydrogénase est largement
déficitaire chez les individus affectés (moins de
6 de la moyenne calculée chez les chats de
contrôle) - Cette enzyme possède également une activité
glyoxylate réductase - Corrélation positive significative entre les deux
actions enzymatiques produits dun gène commun - Valeurs les plus basses pour ces 2 enzymes chez
les individus hétérozygotes (en supposant que la
maladie est autosomique récessive) - Ces dosages représentent donc une perspective
intéressante dans le cadre du dépistage des
porteurs de laffection.
63. Physiopathogénie (2)
- Deux voies métaboliques principales pour
expliquer la présence dacide L-glycérique et
dacide oxalique dans lurine des chats - Déficience en D-glycérate déshydrogénase dans le
cytosol des cellules hépatiques aboutit à
laccumulation dhydroxypyruvate réduit ensuite
en acide L-glycérique par la lactate
déshydrogénase - Impossibilité du glyoxylate à être métabolisé en
glycolate dans le cytosol des cellules du foie à
cause de la baisse dactivité de la glyoxylate
réductase. Il est alors oxydé et transformé en
oxalate vraisemblablement par la lactate
déshydrogénase.
7Métabolisme supposé du glyoxylate dans le foie du
chat
Cellule hépatique féline
8Métabolisme supposé du glyoxylate dans le foie de
lhomme
Cellule hépatique humaine
93. Physiopathogénie (3)
- Lhyperoxaliurie se manifeste de façon beaucoup
plus dramatique chez le chat que chez lhomme
(insuffisance rénale naissante est demblée
aiguë) - Métabolisme singulier du glyoxylate dans les
cellules hépatiques félines - Glyoxylate doublement toxique chez les animaux de
façon - Indirecte en empêchant loxydation du citrate
dans les mitochondries - Directe en générant de lacide oxalique qui en
se déposant dans les reins entraîne
linsuffisance rénale aiguë. - Loxalate est synthétisé majoritairement dans le
peroxysome des cellules hépatiques - Chez lhomme loxalate peut être transaminé en
glycine par lalanine (glyoxylate
aminotransférase) - Chez le chat cette réaction na pas lieu car
lenzyme féline permettant la transamination est
surtout présente dans les mitochondries des
cellules hépatiques. Dès lors, la quantité de
glyoxylate diffusant dans le cytosol est beaucoup
plus importante chez lanimal, le rend plus
sensible à un déficit en glyoxylate réductase
(retentissements sur la fonction rénale sont
dautant plus graves que la synthèse doxalate
sera accrue).
104. Etude anatomo-pathologique
- A. Aspect macroscopique
- Reins irréguliers, de taille augmentée ou
diminuée suivant les individus - Certains montrent un cortex pâle et une
médullaire rouge sombre - Le pelvis contient parfois des cristaux blancs
- Aucune modification physique macroscopique mis à
part une atrophie musculaire généralisée.
114. Etude anatomo-pathologique
- B. Aspect microscopique
- Nombreux cristaux doxalate biréfringents situés
dans les tubules rénaux - Zones circonscrites de fibrose interstitielle
- Fibrose periglomérulaire peut occasionnellement
être apparente - Larges renflements dans les axones proximaux de
la corne ventrale, dans les racines ventrales,
les nerfs intramusculaires mais surtout dans les
ganglions des racines dorsales de la moelle
épinière - Ces protubérances correspondent à laccumulation
de neurofilaments qui sont, à plus long terme, à
lorigine dune dénervation musculaire - Parfois, certains nerfs périphériques montrent
également des signes de dégénérescence
Wallérienne.
12Illustration
Cristaux doxalate intratubulaire chez un
chien(Coloration HES, G. x10 x20 x1,25)
13Illustration
Nombreux axones dilatés (flèches) dans un
ganglion de racine dorsale (coloration Bleu de
Toluidine, G. x120).
14Photographie au microscope du culot urinaire
(cristaux doxalate)
155. Etude clinique (1)
- A. Symptômes et examen clinique
- Apparition des premiers signes de la maladie dès
lâge de 4 mois (de façon brutale) - Signes dinsuffisance rénale aiguë (anorexie,
déshydratation, mauvais état général) - A la palpation abdominale, les reins sont
douloureux, irréguliers et fréquemment augmentés
en taille (bien que certains soient réduits) - Faiblesse qui sinstalle au bout de quelques
jours et saccentuant avec le temps (défaillance
remarquée avant même lémergence du
dysfonctionnement rénal). Elle serait donc
lexpression dun problème neurologique
indépendant. - Refus de monter les marches
- Tendance à écarter les membres à la réception
dune chute - Les nerfs crâniens sont préservés
- Réflexes posturaux et panniculaires sont souvent
touchés - Réflexe patellaire et retrait des membres (face à
un stimulus douloureux) peuvent être diminués - Au cours de la progression de laffection, les
chats saffaissent, les jarrets se fléchissent et
ils ont plus de mal à se tenir debout.
165. Etude clinique (2)
- B. Diagnostic
- 1. Diagnostic clinique, hématologique et urinaire
- Signes cliniques souvent frustres, dominés par un
abattement de lanimal - Suspicion dune atteinte rénale aiguë peut être
levée en réalisant une analyse biochimique du
sang (créatininémie et urémie augmentées, acidose
métabolique, hyperphosphatémie et hyperkaliémie) - Réalisation dun culot de centrifugation permet
parfois dobjectiver la présence de cristaux
doxalate.
175. Etude clinique (3)
- 2. Electromyographie
- Lexamen électromyographique de 3 chats malades a
permis de détecter une activité électrique
spontanée dans un grand nombre de leurs muscles,
caractérisée par des salves de violents
potentiels positifs ou des fibrillations - Cette découverte serait compatible avec des
lésions de dénervations
185. Etude clinique (4)
- 3. Diagnostic histologique
- Lésions histologiques de la maladie décrites
auparavant - La biopsie musculaire napporte aucune
information dans les stades débutants de la
maladie - 4. Investigation biochimique
- McKerrell et al. ont montré
- que les chats malades excrètaient de façon
intermittente de loxalate dans leurs urines et
que leur taux moyen doxalate urinaire/créatinine
urinaire (mol/mol) était nettement supérieur à
celui des chats non affiliés et des animaux
apparentés mais sains - Cependant ce ratio est finalement peu fiable
- Les résultats individuels obtenus avec des
individus affectés dune part, et avec des
individus normaux et apparentés dautre part, se
chevauchent - Variation de ce ratio avec lâge puisque les
jeunes chats, bien portants, âgés de moins de 4
mois, ont une teneur urinaire en oxalate plus
élevée que dautres animaux de la même famille - Sécretion doxalate dans lurine décroît dans les
stades terminaux de laffection.
195. Etude clinique (5)
- Le diagnostic de certitude repose essentiellement
sur la découverte dacide L-glycérique dans
lurine. On utilise pour cela la chromatographie
en phase gazeuse et la spectrophotométrie de
masse. - Seuls les sujets malades auraient un taux
urinaire en glycérate décelable. - Détection des animaux atteints en apparente bonne
santé avant même lapparition de lurémie. - Le dosage des enzymes hépatiques est
difficilement réalisable et nest donc pas
utilisé en pratique pour confirmer le diagnostic.
205. Etude clinique (6)
- 5. Diagnostic différentiel
- Chez le chat, loxalose résulte le plus souvent
dune ingestion accidentelle déthylène glycol
(préparations dantigel) il nest pas
directement toxique mais sont oxydation dans le
foie suscite la formation doxalate et dautres
métabolites dangereux - Signes cliniques observés
- Variables suivant le degré dintoxication
- Polydipsie, polyurie, vomissements, ataxie et une
acidose métabolique (début de lintoxication) - Insuffisance rénale aiguë et acidose 24 à 72
heures après labsorption du produit - Le diagnostic dhyperoxaliurie primaire doit donc
être considéré lorsque linsuffisance rénale
aiguë touche de jeunes chats, quand lhistologie
apporte la preuve de laffection et quand
lanimal na pas pu avoir accès à une source
déthylène glycol.
215. Etude clinique (7)
- C. Pronostic
- Le pronostic de cette maladie est sombre
- Evolution clinique très rapide
- En quelques mois, lanimal ne peut plus se tenir
debout - La mort survient généralement avant lâge de 1
an. - D. Traitement
- Comme la maladie est héréditaire, il nexiste pas
de réel traitement - Par contre, le traitement est basé sur la
symptomatologie - Lutter contre linsuffisance rénale aiguë et ses
conséquences (diarrhée, vomissements) - Réhydrater lanimal, corriger lacidose
métabolique et les troubles hydroélectrolytiques - Maintenir un équilibre nutritionnel et une
diurèse.
225. Etude clinique (8)
- Dautre part, le choix de la nourriture pourrait
avoir une importance considérable dans la durée
de survie de lanimal. - Une colonie de jeunes chats affectés alimentés
uniquement par des boîtes de conserves et une
autre colonie qui reçoit le même type de denrées
en boîte et aussi sous forme daliments secs. De
cette expérience, il ressort que les animaux du
deuxième groupe ne survivent pas au-delà du
neuvième mois alors que lautre population
atteint facilement 17 mois.
236. Importance de ce modèle animal (1)
- Lespèce féline sannonce être un excellent
modèle animal pour lhomme et est intéressant à
plus dun titre - Il permet de mieux appréhender la maladie et
denvisager des essais thérapeutiques comme
lévaluation denzymes inhibitrices qui
réduiraient la formation doxalate - Du point de vue clinique, il se rapproche de
lhyperoxaliurie de type I de lenfant qui
succombe lui aussi très tôt à une insuffisance
rénale. - Les principales différences entre les deux
espèces reposent sur lexistence dune
dénervation du muscle squelettique et la présence
de lésions dans le système nerveux central chez
le chat
246. Importance de ce modèle animal (2)
- Aucune publication ne rapporte une accumulation
de neurofilaments dans les cellules nerveuses
humaines - Par contre, des renflements similaires existent
dans dautres pathologies comme dans la sclérose
amyotrophique latérale de lhomme ou latrophie
musculaire spinale héréditaire de lEpagneul
Breton la façon dont se forment les
protubérances reste indéterminée mais il
semblerait que des substances toxiques
participent à la pathogénie. - Nous pouvons rappeler quen 1999 lAméricain
Günter Blobel a obtenu le prix Nobel de médecine
pour ses travaux concernant linformation que
porte la protéine elle-même.Celle-ci leur permet
dêtre acheminée et reconnue par le site où elle
effectuera la tâche pour laquelle elle est
conçue.Il a parallélement trouvé quune
altération de ce signal pouvait entraîner un
mauvais positionnement de la protéine dans la
cellule et être à lorigine de maladies comme
lhyperoxaliurie primaire, lhypercholestérolémie
-
257. Conclusion
- Lhyperoxaliurie primaire (hyperacidurie
L-glycérique) est une affection héréditaire dont
la transmission est autosomale récessive - Cette maladie est causée par un seul gène ce
dernier peut être masqué dans le génome et la
maladie peut pendant plusieurs mois être
inapparente un accouplement entre deux chats
porteurs pourrait la faire réapparaître - On peut donc conseiller à léleveur le retrait de
la reproduction des individus atteints.
268. Bibliographie
- McKERRELL RE. Primary hyperoxaluria (L-glyceric
aciduria) in the cat. Vet. Ann., 1991, 180-185. - McKERREL RE, BLAKEMORE WF, HEATH MF, PLUMB J,
BENNETT MJ, POLLITT RJ et al. Primary
hyperoxaluria (L-glyceric aciduria) in the cat
a newly recognised inherited disease. Vet. Rec.,
1989, 125, 31-34. - BLAKEMORE WF, HEATH MF, BENNETT MJ, CROMBY CH,
POLLITT RJ. Primary hyperoxaluria and L-Glyceric
aciduria in the cat. J. Inher. Metab. Dis., 1988,
11, supplément 2, 215-217. - DANPURE CJ, JENNINGS PR, MISTRY J, CHALMERS RA,
McKERRELL RE, BLAKEMORE WF et al. Enzymological
characterization of a feline analogue of primary
hyperoxaluria type 2 a model for the hyman
disease. J. Inher. Metab. Dis., 1989, 12, 403-314.