Title: Idologie de performance et luniversit
1Idéologie de performance et luniversité
- Bernard Lapierre
- Philosophe-éthicien
- 2006-02-16
- AÉCSP
2Source de limage Le magazine Jobboom,
Québécor, média, Montréal, vol. 6, no 9, édition
du 15 octobre au 15 novembre 2005.
3- Daprès Argyris 1, il existe deux théories
daction celles quaffichent les individus et
qui englobent leurs croyances, leurs attitudes et
leurs valeurs et, celles quils utilisent en
réalité, leurs théories dusage. 1
http//membres.lycos.fr/autograf/LandryBdx.htm
4- Toute pratique qui évite aux membres dune
organisation déprouver un embarras ou de
ressentir une menace empêche den découvrir les
causes donc dapprendre si vous rencontrez
embarras ou menaces, esquivez la difficulté et
dissimulez lesquive. - Cest un frein à la mise en uvre de la démarche
auto réflexive qui demande quembarras et menaces
soient affrontés et discutés pour favoriser et
rendre durable un apprentissage en double boucle
par une redéfinition des valeurs
5- Faire des choix informés Disposer dune
information valide Contrôler la mise en uvre
pour repérer et corriger les erreurs, consiste à
défendre, évaluer, attribuer avec illustration,
confrontation, test (Modèle dusage de type II),
- alors que Réaliser un objectif Maximiser les
gains et minimiser les pertes - Éliminer les émotions et sentiments négatifs
Adopter une conduite rationnelle, consiste à
défendre ses positions, évaluer les pensées et
les actions dautrui et de soi, assigner des
causes à tout ce que lon essaye de comprendre
sans en vérifier les prémisses (Modèle dusage de
type I). - Ladoption du modèle de type II permet ainsi une
réduction des comportements défensifs, une
interruption des processus auto justificateurs et
auto réalisateurs ainsi que des erreurs en
cascade.
6(No Transcript)
7Définitions du terme idéologie1
- Un ensemble plus ou moins systématisé de
croyances, d'idées, de doctrines, qui influence
le comportement individuel ou collectif. - Selon Revel
- Lidéologie cest ce qui pense à votre place.
- Il serait donc interdit de penser
- 1 http//fr.wikipedia.org/wiki/IdC3A9ologie
8La performance, une nouvelle idéologie 1 ?
- Depuis une trentaine d'années, le paradigme de
la performance a pris des proportions démesurées.
Au sens propre, c'est-à-dire hors de la mesure.
Venu des États-Unis, le welchisme qui
postule qu'à un cadre qui produit 100, il faut
demander 150 pour obtenir 120 ou 130 s'est
répandu en Europe comme une traînée de poudre. - Dès lors que n'existe plus de bien commun, les
cadres, tels des lemmings, s'efforcent d'en faire
toujours plus dans l'attente d'une reconnaissance
illusoire. - 1 Par Collectif d'auteurs sous la direction de
Benoît Heilbrun, La Découverte, 2004, 276 pages
9Les idées forces
- Performance. Le dernier leitmotiv des sociétés
occidentales, à l'origine d'un nouveau contrat
social. Ondoyante et protéiforme, la performance
s'est immiscée dans tous les interstices de notre
vie. Aujourd'hui, il faut performer pour exister.
Et ce diktat, qui marque l'autonomisation de
l'individu, révèle surtout une forme d'obéissance
disciplinaire fondée sur l'injonction constante
du faire plus et mieux . - Concurrence. La performance ne se conçoit que
dans la comparaison qui permet de l'étalonner.
Être performant, c'est être plus que compétitif.
Le culte de celle-ci érige comme paradigme
dominant deux figures emblématiques celle du
sportif et celle du chef d'entreprise. L'un et
l'autre évoluent dans un univers ultra
concurrentiel, entièrement tourné vers
l'action. - Individu. La performance désigne l'individu, le
fait exister. Le dépassement de soi a pour
vocation de fonder une différenciation, alors
même que la société n'a jamais été aussi
égalitariste. - Sélection économique. Le point de rencontre
théorique entre une histoire monotone de la
performance de l'entreprise toujours plus et
mieux pour espérer survivre et une liberté sans
cesse écornée. Une firme performante à moyen et
long termes est une entité vivante qui laisse
évoluer ses ressources et aptitudes
stratégiques. - Illusion. Plus la réussite est flagrante, plus la
vigilance devrait être manifeste. Or il en va
souvent tout autrement. C'est que les succès
récurrents et l'acclimatation graduelle à ce
qu'ils induisent altèrent la perception future.
Trop confortés, les dirigeants en viennent à
négliger des déséquilibres infimes quoique
élémentaires. En ce sens, la performance répétée
devient une illusion dangereuse.
10L'Épidémie de la gestion
- Ils sont parmi nous. Ils nous épient, nous
jugent, nous jaugent et nous calculent. Peu à
peu, ils nous colonisent et nous contaminent.
Bientôt, nous serons tous malades d'eux. Qui
ça? Les gestionnaires! Pour Vincent de Gaulejac,
sociologue de l'Université Paris-VII, les
gestionnaires se sont emparés du pouvoir
économique et imposent leur logique de gestion à
l'ensemble de la société, dénonce-t-il dans son
plus récent ouvrage, La société malade de la
gestion (2005, éditions du Seuil). - Ainsi, tout est géré, plutôt que vécu les
enfants, la famille, la santé, même le sexe! Avec
leur culture de haute performance et de
compétition exacerbée, ils mettent tout le monde
sous pression. - La société n'est plus qu'un champ de bataille
insensé où les gestionnaires s'affrontent à coups
de lubies. Ils ont fait de la gestion - autrefois
un simple outil de travail - une fin en soi.
11Le primat des causes finales dAristote ou les
quatre causes
Expert éthique
Expert technique
12En quoi faut-il s'en méfier, et de quoi nous
menacent-ils?
- Derrière ce modèle de pouvoir aux allures plus
sympathiques, se cachent des objectifs précis,
comme celui de rendre les gens rentables et
éradiquer tout ce qui pourrait être critique par
rapport aux objectifs de l'entreprise. - Avec ce modèle de pouvoir, l'homme a été
transformé en ressource au service exclusif de
l'économie. - Il est devenu un objet et non plus le sujet de
sa vie. (instrumentalisation)
13- Il y a quelque chose de destructeur dans le
monde du travail d'aujourd'hui, avec cette course
permanente à la compétition et cette culture de
la haute performance. - Je ne suis pas contre la compétition dans le jeu,
la collaboration, l'émulation réciproque. - J'en ai contre la part maudite de la performance,
qui met les gens sous pression. - Cela provoque le stress, l'hyperactivité et le
harcèlement social dont sont victimes les
travailleurs tout le monde est harcelé, tout le
monde est harceleur. - Tout le monde met de la pression indue sur tout
le monde.
14La gestion est devenue une idéologie. Qu'est-ce
que ça implique pour le travailleur?
- Une chose très simple la transformation de
l'humain en ressource. Il doit s'adapter sans mot
dire aux exigences de flexibilité,
d'adaptabilité, de productivité et de
rentabilité. - Les rapports entre l'entreprise et la société
sont inversés. Plutôt que l'entreprise soit un
moyen de favoriser le développement de la
société, c'est la société et l'humain qui
deviennent un moyen de développer l'entreprise. - Et puisque c'est une idéologie, il est devenu
subversif de contester cet état de fait. On ne
peut plus exprimer de critiques et de remises en
question du bien-fondé de certaines méthodes ou
objectifs. Alors, les travailleurs somatisent.
Ils gardent ça en eux, ils en font un ulcère à
l'estomac, un burnout ou un infarctus. - La responsabilité de ce qui ne va pas en société
ou dans l'entreprise est renvoyée à l'individu.
15L'idéologie gestionnaire n'a-t-elle pas contaminé
aussi la politique, l'éducation, la famille et
les rapports que nous entretenons avec autrui?
- Aujourd'hui, tout se gère les sentiments, les
relations avec les autres, la famille, sa
performance au jogging et au lit. - Mais le plus grave selon moi, c'est l'influence
sur la politique. L'État se gère maintenant comme
un conseil d'administration, où toute la société
est réduite à une affaire de problèmes
budgétaires et financiers. - L'approche gestionnaire impose ses normes aux
affaires publiques et la gestion privée devient
la référence pour gouverner.
16- Le pouvoir des nouveaux gestionnaires est
librement consenti. Il y a une intériorisation
par les sujets des valeurs imposées. - Par exemple, une de ces valeurs, c'est la qualité
totale. Comment voulez-vous être contre la
qualité? Alors, forcément, vous adhérez à l'idée
de qualité. Vous adhérez au fait qu'on vous
demande de mieux travailler, car personne n'est
contre la vertu. - L'avancement au mérite, difficile d'être contre.
On adhère à l'idéologie gestionnaire parce qu'on
sait que de s'opposer au pouvoir est beaucoup
plus douloureux et psychiquement coûteux.
17Si l'idéologie gestionnaire est bonne à reléguer
aux oubliettes, par quoi doit-on la remplacer?
- Il faut se souvenir de ce qui est au fondement
du lien social - la triple obligation de donner, de recevoir et de
rendre, plutôt que l'actuelle triple obligation
de se vendre, d'être productif et de s'acharner
dans une lutte des places. - Il faut retrouver une harmonie entre le lien
social et l'économie. Je ne suis pas contre le
développement économique, ni le fait qu'il faille
gérer les choses, mais je ne veux pas qu'on gère
les humains comme on gère les choses, et je veux
qu'on réfléchisse aux rapports harmonieux entre
développement économique et développement social.
18Lestime de soi. Quel est le problème ?1
- Il se situe à deux niveaux
- À un niveau logique, tout d'abord, parce que
l'estime de soi suppose l'évaluation du 'soi',
considéré comme une entité stable et définie une
fois pour toutes alors qu'à l'évidence il s'agit
d'un processus, impermanent par essence. Ainsi,
si j'échoue à un examen, je peux penser que je ne
suis pas doué pour les études, alors que rien,
empiriquement, ne permet d'aboutir à une telle
conclusion. Et ce saut logique, erroné, va avoir
un retentissement certain sur mes performances
futures puisque je ne suis pas doué pour les
études, je ne vais certainement pas réussir cet
autre examen non plus, résultat qui viendra
confirmer ma croyance de départ, par le jeu
pervers des prophéties auto-réalisatrices
(Watzlawick, 1988). - À un niveau psychologique, ensuite, la médaille
de l'estime de soi a son revers si elle
augmente lorsque je le mérite (en ayant
réussi à obtenir l'approbation sociale, à
réaliser un projet gratifiant ou à tenir mes
engagements), alors elle diminuera lorsque j'ai
fauté (suite à un rejet social, une mauvaise
performance ou une attitude contraire à mon
éthique). On voit très vite que l'individu moyen
sera sujet toute sa vie à des hauts et des bas
incessants dans son estime de soi , oscillant
entre des états de béatitude où il se prend pour
un dieu et des moments tragiques, où il se
considère comme un ver de terre. - 1 http//fr.wikipedia.org/wiki/Estime_de_soi
19Quelques chiffres sur les jeunes et les jeunes
universitaires1
- 2001 81 emploie dété, 61 emploie chez les
universitaires - 1998 détresse psychologique 15-24 ans, F 34, H
23 - 1999-2001 H F 20-24ans 23.8/100,00, 25-29ans
22.3/100,000 - Au Québec première cause de décès chez les
15-29ans le suicide, plus haut taux didées
suicidaires chez les 15-24ans - Harvard et MIT
- http//www.gouv.qc.ca/consultation/portrait.htnl
20PENSEE UNIQUE - PENSEE INIQUE LECONOMISME 1
- Trois vices
- Le premier, cest le vice de léconomie de
nécessité. Tout ce qui relève de léconomie
serait fatal, incontournable, nécessaire et régi
par des besoins impérieux sous le signe du fatum.
Cest en fait une pensée construite sur le régime
du manque, de la rareté qui "matérialise" ce qui
est "effet de vide" et dont lavidité est un des
moteurs. - Le vice du scientisme économique. Lerreur est de
croire que ce qui nest quune convention
intellectuelle pour décrire un phénomène humain
(léconomie) serait, au contraire, lexpression
de lois, règles, structures, rationalités qui
simposent aux hommes. Ceux-ci, devenus "agents
économiques", ne sont que les marionnettes des
supposées lois économiques. - Le vice de "lintérêt économique . Il repose sur
un mensonge quant au bien commun, quant à la
richesse, quant aux "biens" et "services", quant
à la "valeur", quant au "travail", etc. La clé
est dans la logique de captation. Tout intérêt se
mesure à ce qui est "pris sur les autres", "pris
sur le bien commun", enlevé du bien dautrui.
Ainsi le "bénéfice" ou le "profit" nest pas un
richesse supplémentaire, une valeur ajoutée, mais
une soustraction. - 1 http//journal.coherences.com/article.php3?id
_article59
21Autonomie et idéologie
- Ne devenons pas ce que nous ne sommes pas. JFM
- Notre autonomie nest définie par aucune autre
instance que notre propre créativité dans la
dynamique de notre existence. - La souffrance, cest dêtre le jouet de notre
récit extérieur le bonheur, cest dêtre le
sujet de notre propre récit. - Dénonçons linterdit de penser
- Devenons ce que nous sommes
22(No Transcript)