Title: Linfluence de la proprit intellectuelle sur la concurrence
1- Linfluence de la propriété intellectuelle sur la
concurrence
Abdelkader AZARGUI
2Introduction
- Une influence positive la propriété
intellectuelle, en raison de lexclusivité
quelle garantit à son titulaire, met celui-ci à
labri de la concurrence, sans enfreindre les
règles de celle-ci - Une influence négative Lusage fait de la
propriété intellectuelle - peut porter atteinte à la concurrence.
- Partant de cette dernière influence doit-on
considérer les rapports - entre la propriété intellectuelle et la
concurrence comme étant des - rapports conflictuels?
- /
3Introduction
- La réponse à cette question ne peut être fournie
quà lissue de lexamen de cas concrets où la
propriété intellectuelle a enfreint les règles de
la concurrence en exerçant une influence négative
sur la concurrence. - Cette réponse permettra de conclure à lexistence
de rapports de complémentarité et de
compatibilité entre la propriété intellectuelle
et la concurrence.
4Les cas dans lesquels la propriété intellectuelle
exercice une influence négative sur la concurrence
- La loi sur la liberté des prix et de la
concurrence tantôt sanctionne un certain nombre
de comportements jugés nuisibles à la concurrence
l entente illicite et l abus de position
dominante, tantôt soumet au contrôle la
concentration. - Ces différents comportements dont se saisit la
loi sur la concurrence peuvent être adoptés en
usant de la propriété intellectuelle à trois
niveaux différents - au niveau de lacquisition de la propriété
intellectuelle - au niveau de la détention de cette
propriété - au niveau de lexercice des droits quelle
confère.
5Au niveau de lacquisition de la propriété
intellectuelle
- Les règles de la concurrence veillent sur la
conformité de lacquisition de la propriété
intellectuelle les ententes pour mener des
recherches en commun sont tout à fait valable à
condition quelles ne sétendent pas à
lexploitation du résultat des recherches et ne
fassent pas obstacle à des recherches
individuelles. - Lacquisition par un opérateur disposant dune
position dominante sur un marché donné de droits
de propriété intellectuelle seuls à même de
concurrencer les siens constitue un abus de
position dominante.
6Au niveau de la détention de la propriété
intellectuelle
- Il sagit de situation dans lesquelles la
détention de droits de propriété intellectuelle
donnent lieu à des concentrations fortement
nuisibles à la concurrence, car les effets
horizontaux, verticaux et congloméraux se
ramènent au verrouillage du marché concerné au
bénéfice dune entreprise bénéficiaire de ces
effets. - Il en est ainsi des dans les cas suivants
- Exemple n1 Cas nCOMP/M.2978LAGARDER/
NATEXIS/VUPDECISION COMMISSION 07/01/2004 - Exemple n2 Cas n SEB/Moulinex La décision
du Ministre 2002 et ARRÊT DU CONSEIL
DETAT 10/02/2004 - Exemple n3 Cas n3 TPS et Canalsatellite
avis du conseil de la concurrence du 13 juillet
2006 - Exemple n 4 Cas Coca-Cola/ Orangina ( effet de
gamme et effet de portefeuille)
7Exemple n1 Cas nCOMP/M.2978LAGARDER/
NATEXIS/VUP DECISION COMMISSION 07/01/2004
- Le groupe Lagardère déjà leader dans le domaine
de lédition a projeté dacquérir la totalité du
capital dune société dénommée INVESTIMA 10
détentrice des actifs de VUP, entreprise leader
en matière dédition. - 1) Résultat de lappréciation de la
Commission - Du point de vue des effets horizontaux, La
position dominante sur un marché peut être
déterminée par application de plusieurs facteurs
qui pris isolément peuvent ne pas être
déterminants. Parmi ces facteurs, les parts de
marché qui aussi importantes soient-elle ne
peuvent être une preuve immuables pour
lexistence de la position dominante. La
signification des parts de marché varie de marché
à marché en fonction desdits marchés notamment du
point de vue de la production, de loffre et de
la demande. En outre, le rapport entre les parts
de marché de détenues et les parts de marché des
concurrents tout particulièrement immédiats
constitue un indice valable de lexistence dune
position dominante. Ce rapport permet dévaluer
la capacité concurrentielle des concurrents. (
Hachette 30 à 35 et VUP 15 à 20). - Il est nécessaire de tenir compte des effets
verticaux et congloméraux dans lappréciation des
effets de la concentration. - Les deux entreprises, Lagardère et VUP sont les
leaders incontestés de lédition francophones et
sont présents sur un très grand nombre de marchés
et sur toute la chaîne du livre, notamment en
qualité de diffuseurs et de distributeurs dun
grand nombre déditeurs. En plus LAGARDERE est un
conglomérat sur dautres marchés des médias - La concentration LAGARDERE / VUP réalisée, la
taille de lentité fusionnée serait près de 7
fois supérieure à Gallimard, son concurrent le
plus immédiat, si lon ne tient compte que des
activités livres. Lentité fusionnée - disposerait dun portefeuille de marques et
dauteurs connus très large et dune présence
dans toutes les catégories de livres
contrairement à ses concurrents immédiats - serait présente à tous les échelons de la chaîne
du livre et même au niveau de la vente au détail
contrairement à ses concurrents immédiats. - 2) La décision de la Commission
8Exemple n2 Cas n SEB/Moulinex La décision
du Ministre 2002 et ARRÊT DU CONSEIL
DETAT 10/02/2004
- Dans ce cas les sociétés SEB et Moulinex opèrent
dans le secteur des équipements électroménagers.
Suite à des difficultés, La société Moulinex est
déclarée en redressement judiciaire. SEB présente
son offre pour lacquisition des actifs de
Moulinex dans le cadre de cette procédure. Dès
que cette offre a été retenue, SEB sest
empressée de demander lautorisation de la
Commission européenne pour réaliser cette
opération de concentration. - Sur la demande des autorités françaises, le
renvoi de cette opération a été opéré au Ministre
Français de lEconomie pour la partie du dossier
concernant la concurrence sur le territoire
français. Celui ci octroie son accord pour la
réalisation de lopération de concentration
entre SEB et Moulinex. - Sur la base dun recours formé contre cette
décision du Ministre, par des concurrents, le
Conseil dEtat français a annulé la décision du
ministre en raison de labsence de neutralité de
lopération sur la concurrence.
9Exemple n3 Cas n3 TPS et Canalsatellite
avis du conseil de la concurrence du 13 juillet
2006
- Il sagit dans ce cas de lacquisition par
Vivendi et Groupe Canal de - 1) TPS une SNC de droit français contrôlée
à concurrence de 66 par TF1, elle-même contrôlée
par le groupe Bouygues, et à concurrence de 34
par M6 dont le principal actionnaire est RTL. Les
activités de TPS sexercent principalement dans
la télévision à péage , notamment dans les
domaines qui suivent - lacquisition des droits audiovisuels
- lédition de chaînes de télévision à péage
- la distribution en France de bouquets de services
de télévision et de radio. -
- 2) Canal satellite une S.A de droit français
dont le capital est détenu à concurrence de 66
par Groupe Canal plus et 34 par Lagardère Active
filiale du groupe Lagardère. - Les activités de Canal Satellite sexercent
principalement dans la télévision à péage ,
notamment dans les domaines suivants - Lédition de chaînes de télévision à péage
- La distribution en France de bouquets de chaînes
de services de télévision et de radio.
10- Conséquences de la concentration envisagée
- 1) La réunion au sein de la même entité de
trois marques importantes du secteur
audiovisuel Canal, CanalSat et TPS ce qui
est de nature à constituer ou renforcer les
barrières à lentrée sur les marchés
intermédiaires et renforcer le pouvoir de
négociation de lentité naissant de la
concentration vis-à-vis des éditeurs et des
distributeurs indépendants. - 2) la réunion au sein de la même entité de
lensemble des chaînes détenues par Groupe Canal
Plus et TPS. Par conséquent, elle détiendra une
position forte dans les marchés intermédiaires du
cinéma, sport et premium en qualité doffrante et
dacheteuse. Cette position est à même de servir
de levier pour renforcer la position des parties
sur dautres marchés intermédiaires, notamment
les chaînes de la jeunesse où leur position est
moins importante - 3) Aucun offrant (éditeur) concurrent nest à
même doffrir sur les marchés intermédiaires une
gamme de produits aussi varié et complète que
celle proposée par les parties. Cette situation
est susceptible de pousser les parties à imposer
à certains distributeurs dacheter, dans le
cadre de ventes groupées, leurs chaînes . En
outre, en qualité dacheteur , il leur est
possible dexiger le regroupement de chaînes
déditeurs indépendants, des remises ou même des
exclusivités larges. - Position du Conseil de la concurrence Son
accord pour la réalisation de cette concentration
a été assorti de plusieurs conditions consistant
en des remèdes à même datténuer les restrictions
que fait peser la concentration projetée sur la
concurrence
11Exemple n 4 Cas Coca-Cola/ Orangina ( effet
de gamme et effet de portefeuille)
- Il sagit dans ce cas de lacquisition de
Orangina par Coca-cola - 1) La société américaine The Coca-Cola Company
(ci-après TCCC) est le premier fournisseur
mondial de concentrés et de sirops servant à
produire des boissons gazeuses sans alcool. Elle
détient quatre des cinq marques de boissons sans
alcool les plus vendues au monde et est présente
dans près de 200 pays. - 2) La société française Pernod Ricard produit
et distribue par lintermédiaire de ses
filiales des boissons alcoolisées et des
boissons rafraîchissantes sans alcool (boissons
gazeuses, boissons pour enfants, sirops et
concentrés de fruits). Sa marque la plus connue
est Orangina (boisson gazeuse sans alcool). - 3) Les boissons de marque Orangina
( Orangina , Orangina Light , Orangina
Plus et Orangina Rouge ) représentent
10-20 du chiffre daffaires français du
groupe (environ ... milliard de francs sur un
total de 6,3 milliards de francs)
12- La position du Conseil de la concurrence
- En ce qui concerne le marché des BGSA, autres que
les colas, destinées à la consommation hors
foyer - 1) Compte tenu du fait que Le groupe
Coca-cola détient 23,9 du marché des BGSA autres
que les colas destinées à la consommation hors
foyer grâce à ses marques Fanta et
Sprite que la marque Orangina détient
quant à elle 33,5 de ce marché que la
réunion des trois marques Fanta , Sprite
et Orangina accorderait au nouvel ensemble,
après concentration, une part du marché allant
jusquà 57,4 et par conséquent lui permettrait
doccuper une position significative sur ce
marché, car les autres concurrents présents sur
ce même marché, Le groupe Cadbury Schweppes avec
ses marques Schweppes Indian Tonic ,
Schweppes Dry , Gini et Canada Dry et
de la société Pepsi-Cola avec sa marque Seven
Up noccupent respectivement sur ce marché que
7 et 2,8 du marché. - 2) Compte tenu du fait que le groupe
Coca-Cola détient également près de 91 du
marché des colas à destination de la consommation
hors foyer - 3) Compte tenu du fait que, si les points de
vente de la consommation hors foyer doivent
offrir plusieurs variétés de BGSA, leurs
contraintes despace les conduisent généralement
à sélectionner une seule marque pour chaque
variété de BGSA que, leur choix va vers une
marque de grande notorité faisant lobjet dune
demande forte et spontanée des consommateurs. Or
les deux marques les plus attractives pour les
consommateurs demeurent Orangina représentant
plus de 33,5 des ventes en volume de BGSA
autres que les colas destinées à la consommation
hors foyer et que Coca-Cola représentant
près de 91 des ventes de colas dans les
circuits de la consommation hors foyer - /
-
13- 4) Compte tenu du fait que leffet de gamme ou
de portefeuille peut être optimisé par le nouvel
ensemble qui pourrait être issu de la
concentration pour améliorer les ventes dautres
boissons moins bien vendues que celles notoires - 5) Compte tenu du fait que les habitudes de
consommation hors foyer ont des incidences sur
les ventes des marques en distribution
alimentaire. En ce sens que le succès rencontré
par une marque sur les différents circuits de la
consommation hors foyer a une incidence sur les
ventes de cette même marque en distribution
alimentaire - 6) Compte tenu de son avis no 98-A-09 relatif
au précédent projet dacquisition par TCCC des
actifs du groupe Pernod Ricard concernant les
boissons de marque Orangina , le conseil de la
concurrence décide de ne pas émettre un avis
favorable pour ce projet de concentration.
14Au niveau de lexercice des droits de propriété
intellectuelle
- Lexemple n 1 Les ententes illicites
- 1) Les licences en biotechnologie les
perfectionnements séparables et les communautés
de licences - 2) Les licences les mises en commun des
brevets . - Lexemple n2 Labus de position dominante
- 1) Le cas de Magill
- 2) Le cas IMS Health GmbH Co. OHG / NDC Health
GmbH Co KG - 3) Le cas des codes Rousseau du 31/03/2004
- 4) Le cas Société Abbott du 10 mai 2001
15Les rapports des droits de propriété
intellectuelle avec les règles de la concurrence
sont des rapports de complémentarité plutôt que
conflictuels
- Deux attitudes peuvent être adoptées
- 1) soit chercher à défendre de manière absolue
les droits de - propriété intellectuelle
- 2) soit chercher à soutenir lascendant dont
dispose le droit de la - concurrence sur les droits de propriété
intellectuelle en létat. - En réalité, aucune des deux démarches nest
satisfaisante, à moins - de verser dans le sens dune attitude tranchée et
absolue au profit des droits de - propriété intellectuelle ou au bénéfice des
règles de la concurrence et, par - conséquent, envisager systématiquement les
rapports entre ces droits et les règles - de la concurrence sous un angle purement et
simplement conflictuel.
16- Afin de se départir de cette vision conflictuelle
des rapports propriété intellectuelle/Concurrence,
il serait nécessaire de - 1) démontrer que le droit de la concurrence
ne constitue pas la négation du droit de
propriété intellectuelle lexclusivité nest pas
contestée - 2) focaliser sur les finalités de la
propriété intellectuelle et du droit de la
concurrence en vue de les rapprocher et les faire
converger. - Seule cette approche conciliatrice permet de
dégager les enseignements véhiculés par les cas
concrets exposés et la logique les dominant.