Title: Gautier DUFLOS gautier'duflosunivparis'fr
1Gautier DUFLOSgautier.duflos_at_univ-paris.fr
- ECONOMIE ET POLITIQUE DE LA CONCURRENCE
- -Innovation et Concurrence-
2Les Accords de LicencePlan de la Séance 3
- Introduction
- Licences Croisées
- Licences Verticales et lÉcole de Chicago
- 3.1 Modèle de Stefanadis (1998)
- 3.2 Le cas Microsoft vs. US (1994)
- Conclusion générale sur les licences
3Les Accords de Licence1) Introduction
- Nous avons vu dans Lin (1996) comment des
licences unilatérales-horizontales peuvent
favoriser les cartels en assurant la stabilité
dun équilibre collusif. - Nous allons maintenant présenter les autres cas
de figures licences croisées (vs. unilatérales)
et verticales (vs. horizontales) - puis nous intéresser plus précisément aux
licences unilatérales-verticales (vs.
unilatérales-horizontales comme dans Lin, 1996).
4Les Accords de Licence1) Introduction
- Bibliographie
- E. Combe (2005) Chap. 5 et Chap. 6
- C. Stefanadis (1998) Selective contracts,
Foreclosure, and the Chicago Scool View, Journal
of Law and Economics, Vol. XLI pp. 429-450
5Les Accords de Licence1) Introduction
- Les licences unilatérales entre concurrents
peuvent être guidées par des considérations
defficacité économique - Cest le cas lorsquelles contribuent à améliorer
le bien-être, en augmentant le surplus des
consommateurs (baisse de P) ou celui des
producteurs (augmentation de p) - Un contrat de licence prévoyant seulement une
redevance fixe peut cependant être propice à la
collusion dans le cadre dun jeu répété à horizon
infini - Le modèle de Lin (1996) montre en effet que la
cession de licence peut renforcer la stabilité
dun cartel en créant une menace de punition en
cas de déviation de léquilibre collusif
6Les Accords de Licence2) Licences Bilatérales
- Le cas des licences bilatérales
- On parle aussi de Licence Croisées parce que
les firmes séchangent des licences sur leurs
innovations respectives - Elles sont, en générale, motivées par des
considérations defficience (Gilbert, 2001) - Nous verrons cependant que ce nest pas toujours
le cas
7Les Accords de Licence2) Licences Bilatérales
Efficience
- Permettent de résoudre des litiges entre firmes
sur la paternité ou la validité dune invention - Un procès en contrefaçon est généralement long et
couteux - Les parties prenantes peuvent décider de régler
le litige à lamiable en se cédant mutuellement
leurs technologies sous licence - Cette pratique est fréquente dans les industries
où le brevet est peu efficace - Anand Khanan (2000) cela explique la forte
proportion de licences croisées dans lindustrie
électronique (20 du total des licences sont
croisées) en comparaison, dans lindustrie
chimique, elles ne représentent que 10 des
accords
8Les Accords de Licence2) Licences Bilatérales
Efficience
- Préviennent des situations de hold-up
- Lévêque et Ménière (2003) dans les secteurs où
le progrès technique est rapide (ex.
semi-conducteurs) linventeur nest pas sûr de
conserver son avantage en RD - Dautres innovateurs sont alors capables
dapporter des améliorations - En passant un accord sur léchange réciproque de
licences à venir sur des technologies et des
améliorations non encore brevetées, les
innovateurs se prémunissent contre le risque de
ne pas pouvoir exploiter leur invention et de
faire lobjet de poursuites au tribunal
9Les Accords de Licence2) Licences Bilatérales
Efficience
- Permettent de surmonter les brevets bloquants
- Certain brevets peuvent bloquer une
technologie. - Linnovation est en effet toujours plus ou moins
cumulative elle repose sur une connaissance
existante - Klein (1997) chaque firme ne dispose que dune
partie de la technologie nécessaire pour produire
le bien final et doit faire appel à la
technologie possédée par le concurrent pour
réaliser la totalité du produit ou du procédé
10Les Accords de Licence2) Licences Bilatérales
Efficience
- Favorisent le développement dun standard
technologique - Les licences croisées permettent le développement
dun standard technologique entre firmes
concurrentes. - Un exemple est celui du format de compression
numérique audio et vidéo MPEG (Motion Picture
Expert Group), le fameux MP3 - Le MPEG résulte de la mise en uvre de 27 brevets
émanant de 7 entreprises différentes Fujitsu,
General Instrument, Lucent, Matsushita, Philips,
Scientific-Atlanta, Sony et luniversité Columbia - Selon Charles River Associate (2003) le pool
MPEG-2 rassemble 527 brevets issus de plusieurs
dizaines dentreprises
11Les Accords de Licence2) Licences Bilatérales
Efficience
- Les licences bilatérales permettent aussi
déviter le paiement mutuel de redevances - Cela diminue le cout marginal de production et
donc le prix payé par le consommateur - Cependant les licences croisées peuvent parfois
être propices à la collusion
12Les Accords de Licence2) Licences Bilatérales et
Collusion
- Le cas des technologies complémentaires
- Le choix du niveau des redevances fixé dans des
accords bilatéraux peut révéler une stratégie
limitant la concurrence - En effet, le licenceur peut influencer le cout de
production de son concurrent de telle sorte que
la production totale à léquilibre soit égale à
celle dun monopoleur
13Les Accords de Licence2) Licences Bilatérales et
Collusion
- Modèle de Fershtman Kamien (1992)
- Deux firmes en concurrence à la Cournot
- Chacune delle a innové en procédé
- Les technologies sont complémentaires
- La production du bien nécessite la combinaison
des deux technologies - Les firmes sengagent dans une cession de licence
croisée - On constate alors quen jouant simplement sur le
taux de redevance variable, les firmes sont en
mesure dobtenir un équilibre de collusion avec
un certain niveau de royaltie, la production
déquilibre individuelle est égale à la moitié de
la production de monopole
14Les Accords de Licence2) Licences Bilatérales et
Collusion
- Modèle dEswaran (1992)
- Ici cest la cas de deux technologies
concurrentes - Duopole à la Cournot avec produits différenciés
- Le modèle montre que léchange mutuel de
technologie peut soutenir un équilibre collusif - Chaque firme saccorde pour ne pas produire la
technologie du concurrent, tant que ce dernier
respecte léquilibre de collusion
15Les Accords de Licence2) Licences Bilatérales et
Collusion
- Dans le cadre dun jeu répété, le modèle montre
que les firmes peuvent navoir jamais intérêt à
tricher de peur dêtre concurrencées par leur
propre technologie qui est licencé à lautre
firme ! - Comme dans le modèle de Lin, la licence stabilise
un cartel en créant des moyens de punir la
déviation de léquilibre collusif assure la
stabilité - On parle alors de Licences croisées dormantes
- Lobjet de laccord est en effet purement
dissuasif
16Les Accords de Licence3) Licences Verticales
- Les restrictions verticales peuvent être
utilisées par une firme dominante pour
verrouiller le marché en amont ou en aval - On parle de forclusion du marché
- Certains accords de licence permettent cette
forclusion ce qui est dommageable aux
consommateurs - Nous allons voir comment fonctionne la forclusion
avec le modèle de Stefanadis (1998)
17Les Accords de Licence3) Licences Verticales
- Lécole de Chicago
- Lidée de pouvoir forclore un marché par le
biais dune clause dexclusivité a été souvent
contestée par les économistes de Chicago (Posner,
1976 Bork, 1993) - Selon eux aucun acheteur nacceptera de signer
un contrat dexclusivité avec la firme installée
si un distributeur plus efficient peut entrer sur
le marché et si la firme installée ne lui propose
pas une compensation financière suffisante - La compensation financière maximale que peut
offrir la firme installée correspond à son profit
de monopole et ce transfert est inférieur à la
perte de surplus des clients qui nont alors
aucune raison de signer un tel contrat.
18Les Accords de Licence3) Licences Verticales
- Plusieurs remises en cause du point de vue de
Chicago sur la distribution exclusive - Si la firme 1 est présente sur plusieurs marchés
alors que lentrant ne peut pénétrer que sur un
seul marché, la firme 1 peut utiliser les profits
réalisés sur les autres marchés pour offrir une
compensation suffisante aux clients - Si les clients sont nombreux et si la firme
entrante doit atteindre un seuil minimal de
client pour couvrir ses coûts fixes, la firme
installée peut utiliser les contrats
dexclusivité pour forclore le marché - Car ils sont nombreux, les clients ne peuvent pas
coordonner leurs décisions ils vont donc tous
accepter et signer avec la firme installée. Cette
dernière tire alors partie du défaut de
coordination entre les clients Rasmusen et al.
(1991)
19Les Accords de Licence3.1) Licences Verticales
Stefanadis (1998)
- Autre remise en cause le modèle de Stefanadis
- Soit une structure verticale avec deux firmes
Upstream , U1 la firme installée et U2 la
firme entrante, situées en amont et deux firmes
Downstream , D1 et D2 situées en aval. - Les firmes en aval produisent un bien final
différencié - La firme U1 a déjà amorti le coût fixe dentrée
et produit avec un coût marginal égale à m1 - La firme U2 entre et doit donc supporter un coût
fixe dentrée F - La firme entrante dispose dun avantage
technologique tq - m2 lt m1
20Les Accords de Licence3.1) Licences Verticales
Stefanadis (1998)
- Linnovation de U2 nest pas drastique
- le prix de monopole de U2 est supérieur à m1
- Le jeu se déroule en 5 étapes
- U1 peut offrir un contrat dapprovisionnement
exclusif à lune ou aux deux firmes en aval,
avant que U2 nait décidé dentrer ou non sur le
marché si le contrat est offert aux deux firmes
le choix de production est pris simultanément - Si lune des deux firmes seulement à signé à
létape précédente, la seconde peut encore signer
un accord exclusif avec la firme U1 - La firme U2 décide ou non dentrer sur le marché
- En amont, si la firme U2 entre, les deux
producteurs se livrent à une concurrence
(simultanée) en prix si la firme U2 nentre pas,
la firme U2 pratique un prix de monopole - En aval, les firmes fixent simultanément leur
prix de vente - U1 dispose dun avantage temporel en pouvant
offrir un contrat dexclusivité avant que U2
nait pris la décision dentrer sur le marché
21Les Accords de Licence3.1) Licences Verticales
Stefanadis (1998)
- Supposons que lentrée de la firme U2 est
toujours profitable si aucun contrat
dexclusivité nest signé avec la firme U1 soit
si - 2(m1-m2) Qi (wm1 wm1) F gt 0
- avec Qi (w w) la demande dune firme en aval
Di , pour un prix w à la firme Di égal à m1 et
pour un prix w à la firme Dj égal à m1 - Comme la firme U2 supporte le coût dentré F,
elle ne peut couvrir son coût fixe quavec une
certaine part de marché - Pour décourager lentrée de U2 , U1 doit juste
capter un nombre suffisant dacheteurs et
empêcher U2 de les fournir
22Les Accords de Licence3.1) Licences Verticales
Stefanadis (1998)
- Formellement
- Sil ne reste plus quun seul client à
satisfaire, alors la firme U2 ne peut jamais
faire un profit positif si elle entre - On a donc
- (p -m2) Qi (p w) F lt 0 pour tout p gt 0 et
w ? m1 wM - La firme U2 supporte un coût dentrée F donc
elle ne peut couvrir son coût fixe si elle vend
seulement à lune des firmes en aval même si la
firme U1 pratique un prix de monopole wM sur son
client
23Les Accords de Licence3.1) Licences Verticales
Stefanadis (1998)
- Si la firme U1 noffre pas de contrat
dexclusivité à létape 1, la firme U2 entre à
létape 3 et remporte la totalité du marché en
pratiquant un prix limite égal au coût de
production de sa rivale, soit m1 - Si la firme U1 propose un contrat exclusif
seulement à la firme D1 , cette dernière accepte
loffre si le prix de vente est au moins égal à
celui quelle obtiendrait en refusant de signer,
soit m1 - Cependant lacceptation dun tel contrat améliore
également la situation de la firme D1 par rapport
au concurrent D2 - En signant le firme D1 exclut U2 du marché le
second client D2 se trouve désormais face au
monopole de U1 et subit un désavantage de coût
dapprovisionnement
24Les Accords de Licence3.1) Licences Verticales
Stefanadis (1998)
- La firme installée peut donc exiger de la firme
D1 un prix supérieur à m1 (qui correspond à w1) - A léquilibre nous avons donc
- W M gt W1 gt m1 et W2 gt W1
- Si la firme installée propose le contrat aux deux
firmes D1 et D2 elle doit proposer un prix
inférieur ou égal à m1 sinon les clients refusent
de signer et la firme U2 entre sur le marché
25Les Accords de Licence 3.1) Licences Verticales
Stefanadis (1998)
- La meilleure stratégie pour la firme installée
consiste alors à offrir un contrat
dapprovisionnement à une seule des deux firmes à
la première étape du jeu - Cette stratégie est mutuellement avantageuse
- Pour la firme installée, elle permet déviter
lentrée de la firme U2 qui est pourtant plus
efficace - Pour la firme D1 elle conduit à désavantager sa
concurrente D2 en augmentant son coût de
production
26Les Accords de Licence3.1) Licences Verticales
Stefanadis (1998)
- Il est important de souligner que le contrat
dapprovisionnement conclu entre la firme D1 et
la firme installée doit impliquer une forme
dengagement irréversible pour dissuader U2
dentrer - En effet, dans le cas contraire, la firme U2
entre et propose aux firmes en aval de rompre le
contrat qui les lie à la firme U1 et la stratégie
de forclusion est mise en échec. - Cette irréversibilité peut prendre différentes
formes - Exigence dincompatibilité des produits avec les
inputs du concurrent - Coûts prohibitifs de renégociation
- Contrat avec pénalité en cas de rupture etc.
27Les Accords de Licence 3.2) Le cas Microsoft vs.
US
- Ce modèle représente bien le cas Microsoft
- Microsoft proposait à certains clients un
contrat de licence sur son logiciel Windows à un
prix très attractif, dés lors que les conditions
suivantes étaient respectées - Le contrat devait être signé pour 3 ans ou plus
- Le client devait payer une redevance sur chaque
unité dordinateur produit quel que soit le
système installé (W ou autre) contrat par
processeur
28Les Accords de Licence 3.2) Le cas Microsoft vs.
US
- Ce type de contrat est donc de nature à dissuader
un constructeur de PC dinstaller un autre
logiciel que Windows - en effet cela reviendrait à payer deux
licences! - Dans la mesure où les contrats sur Windows ont
été acceptés par les principaux constructeurs, la
concurrence ne disposait plus dune demande
résiduelle suffisante pour assurer leur
rentabilité - les contrats par processeur relèvent donc
dune stratégie de forclusion du marché par
Microsoft
29Les Accords de Licence 3.2) Le cas Microsoft vs.
US
- Pour les constructeurs, loffre de Microsoft à
faible prix permet de limiter la concurrence des
cloneurs , qui ne se voient pas proposer ce
type de contrat - Au cours de linstruction du dossier, les
principaux client de Microsoft nont dailleurs
pas dénoncé ces pratiques - A la lumière de lanalyse de Stéfanadis, on peut
supposer que les contrats de ce type sont en
réalité mutuellement avantageux pour les firmes
installées - pour Microsoft mais aussi pour Dell par
exemple
30Les Accords de Licence 3.2) Le cas Microsoft vs.
US
- Récapitulatif des Licences de Microsoft sur
Windows - Une clause spéciale précisait que les redevances
étaient perçues par ordinateur vendu (que le
logiciel figure sur cet ordinateur ou pas). - Clause de monomarquisme aux grands fabricants le
logiciel était alors vendu à un prix moins élevé
et les concurrents de Microsoft étaient empêchés
dentrer. - Défense de Microsoft
- Effet informationnel,
- Contrats de long-terme meilleure visibilité,
investissements. - Les autres concepteurs de logiciels doivent créer
leur propre structure de production. - Mais le DOJ a estimé que cela ne suffisait pas
31Les Accords de Licence 3.2) Le cas Nintendo vs.
Atari
- A la fin des années 80, Nintendo inclut des
clauses dexclusivité dans les contrats de
licence de ses concepteurs de jeux. - Ils ne peuvent réaliser une version dun jeu
Nintendo pour Atari avant deux ans. - Défense de Nintendo
- Investissement publicitaire,
- Les jeux sont un marché concurrentiel Atari na
quà trouver des idées originales. - Cette fois-ci, les arguments de Nintendo
prévalent face à ceux dAtari (qui met en avant
la position dominante de Nintendo).
32Les Accords de Licence 4) Conclusion générale
- Un accord de licence unilatéral peut faciliter
une stratégie de collusion de deux manières - En donnant à un adversaire potentiel une
technologie licences horizontales (Lin, 1996) - 1 Cet adversaire possède alors une menace de
punition plus crédible. - 2 En fixant le niveau de redevance, le licenceur
peut déterminer la compétitivité de son
adversaire - En incorporant des clauses explicites
susceptibles de réduire la concurrence licences
verticales - (Stefanadis, 1998)
33Les Accords de Licence 4) Conclusion générale
- Le traitement des accords de licence reste
difficile - Ils sont très nombreux il faudrait donc une
procédure automatisée. - Les clauses ont des effets ambigus
- dans les années 70, neuf dentre elles étaient
interdites puis application de la règle de
raison . - LUE a défini des clauses noires (fixation de
prix, entrave au commerce communautaire), les
autres étant autorisées ( blanches ) ou étant
soumises à la règle de raison . - Certains accords dépourvus de clause restrictive
peuvent avoir des impacts anticoncurrentiels,
mais - Difficile à démontrer
- Ce nest pas toujours contraire à lefficacité.