Title: Colloque
1Colloque Politique, science et action
publique Les dilemmes du pilotage de la
recherche entre les organismes, les agences et
les universités
- J-F Méla
- (Grenoble 23.10.08)
2Introduction
- Nous sommes entrés dans une période de
réorganisation de notre système denseignement
supérieur et de recherche qui va probablement
sétendre sur plusieurs années. - Un ensemble de réformes incomplètes et
controversées. - La situation est instable et conflictuelle et
beaucoup dacteurs se réfugient sur des positions
défensives.
3Introduction
- 2003
- - Gel de crédits recherche et suppressions de
postes. Manifestations de chercheurs et
duniversitaires. - 2004 Etats Généraux de la Recherche (Grenoble).
- Divergence de fond sur les orientations
- - Les chercheurs réclamaient en priorité des
moyens. - - Le pouvoir politique mettait en cause la
lourdeur du système de recherche et son
incapacité à contribuer de façon efficace au
progrès technologique.
4Introduction
- Stratégie de Lisbonne qui vise à faire de
lUnion Européenne léconomie de la
connaissance la plus compétitive et la plus
dynamique du monde . - La recherche vue comme moteur de léconomie, et
la volonté du pouvoir politique de la piloter en
ce sens. - Volonté de promouvoir une organisation qui
sinspire du modèle anglo-saxon (universités
autonomes et agences qui financent des projets),
assez éloigné du système qui a prévalu en France
jusquici.
5Les réformes de 2006-2007
- 2006 Loi de programme pour la recherche
(LOPR) - - Création dune agence de programmes (ANR) avec
des moyens très importants, mais sans conseil
scientifique. - - Création dune agence dévaluation (AERES) à
compétence universelle. - - Remise en cause implicite du rôle des
organismes.
6Les réformes de 2006-2007
- 2007 Loi relative aux libertés et aux
responsabilités des universités (LRU) - La LRU dote les universités dune nouvelle
gouvernance plus managériale qui renforce le
pouvoir des présidents. - La LRU accorde aux universités des compétences
élargies en matière de budget et de personnels.
7Objectifs(Discours du pdt de la République -
28.01.08)
- La première grande orientation, cest de mettre
lUniversité au centre de notre dispositif de
recherche. (..) Il faut le faire parce que les
systèmes de recherche les plus performants du
monde sont construits sur la force des
universités et non pas sur leurs faiblesses. (..) - La réforme, cela va impliquer dabord une chose
très difficile qui est de redéfinir les missions
des organismes. Déchargés du poids dune partie
de la gestion administrative et financière,
bientôt confiée aux universités, déchargés de
lévaluation, confiée à lAgence pour
lEvaluation de la Recherche et de lEnseignement
Supérieur, les organismes devenus agences de
moyens davantage quopérateurs, mettront en œuvre
la politique scientifique que le Gouvernement et
le Parlement leur auront confiée.
8Objectifs(Discours du pdt de la République -
28.01.08)
- Les organismes pourront ainsi, en étroite
concertation avec lAgence Nationale de la
Recherche, se consacrer pleinement à leur
véritable mission, le pilotage des recherches
menées dans les universités, quil sagisse de la
sélection, de lanimation ou de la coordination
des meilleurs projets. - A terme, les organismes ne devraient conserver
en propre que les activités qui gagnent à être
organisées et coordonnées au niveau national. Je
pense aux grands moyens de calcul, aux grands
équipements et aux grandes plateformes
technologiques, mais aussi aux programmes qui
requièrent un regroupement de nos forces et une
coordination nationale, comme le font déjà
certains instituts au sein des organismes de
recherche, je pense notamment à ce que fait le
CNRS. - Toutes les autres activités ont vocation à se
développer dans les laboratoires universitaires,
dans un esprit de loyale et de fructueuse
compétition.
9Objectifs
- Passage dun système colbertiste où la
recherche était pilotée et effectuée par des
organismes nationaux, à un système plus
décentralisé autour des universités, mais avec un
pilotage stratégique par lEtat au travers de
programmes de recherche quil propose et quil
finance, via lANR et les organismes.
10Au terme dune longue évolution
- La loi du 15 juillet 1982 dorientation et de
programmation pour la recherche et le
développement technologique de la France, ne
faisait pas grand cas des universités et traitait
surtout des organismes de recherche qui étaient
les véritables piliers du système.
11Au terme dune longue évolution
- La composante universitaire a pris de plus en
plus dimportance - Démographie Doublement des effectifs
denseignants chercheurs en 20 ans. On recrute
3.000 enseignants chercheurs (2.000 MCF) contre
400 chercheurs CNRS (275 CR2). - La politique dassociation avec le CNRS (qui a eu
un rôle historique majeur) a structuré la
recherche sur les campus. Les UMR, constituées
aux deux tiers denseignants chercheurs, ont une
existence propre forte dans les universités.
12Au terme dune longue évolution
- Importance prise par les écoles doctorales, lieux
de formation de 10.000 docteurs. - Importance de la dimension territoriale et des
pôles universitaires. - La politique de contractualisation a entraîné
(sans modification législative) le passage dun
pilotage centralisé à un pilotage plus
stratégique par lEtat, et lémergence de
politiques détablissements.
13Au terme dune longue évolution
- Les lourdeurs du CNRS sont devenues de plus en
plus sensibles derrière ses avantages
institutionnels. - Avantages institutionnels normes
dorganisation, qualité du recrutement,
procédures dévaluation, capacités de gestion et
support administratif offert aux laboratoires.
14Au terme dune longue évolution
- Le CNRS est pour les universités un organe de
validation plus que dimpulsion. - Le CNRS nest pas très réactif dans
laccompagnement des recherches émergentes
(exemple linformatique) et des opérations
nouvelles. - Le CNRS a de grandes difficultés à dégager des
marges de manœuvres pour marquer des priorités
(ce qui avait motivé la création du FNS). - Le CNRS a le plus grand mal à couper ses branches
mortes (difficulté en partie liée au statut des
chercheurs).
15Le CNRS dans le contexte international
- CNRS organisme généraliste, sans équivalent
étranger, de 12.000 chercheurs à plein temps
fonctionnaires. - Société Max Planck 3.000 chercheurs dont une
grande majorité de contractuels. 80 instituts
associés aux universités. - Les universités autonomes voudront devenir
maîtres de la plupart de leurs laboratoires. Le
périmètre dopérateur du CNRS est appelé à se
restreindre. Mais une stratégie visant à
récupérer les meilleures UMR comme unités propres
en laissant les autres aux universités, serait
inacceptable par celles-ci et contraire à
lesprit de la réforme.
16Le CNRS dans la réforme
- Le rôle dopérateur du CNRS ne peut être, à
lavenir, que complémentaire de celui des
universités. - Le rôle dagence de moyens du CNRS sa
spécificité par rapport à lANR sera, notamment,
dêtre une agence de moyens humains. - Le nombre de chercheurs permanents est appelé à
diminuer. Mais le potentiel total de recherche à
plein temps peut être maintenu par la formule des
chaires CNRS .
17LANR dans le contexte international
- LANR se distingue des agences de moyens des
autres pays, dune part par son caractère
monopolistique , dautre part par son mode de
pilotage politique et laccent mis sur les
programmes thématiques. - La Grande Bretagne possède 7 agences (research
councils) correspondant à de grands champs
disciplinaires. - Les USA ont une grande agence généraliste, la NSF
qui finance principalement des programmes
blancs . A côté il y a le NIH pour la recherche
biologique et médicale, avec des moyens
considérables. - LAllemagne possède une grande agence généraliste
la DFG qui est pilotée par la communauté
scientifique.
18LANR dans la réforme
- L'ANR qui finance des programmes de durée limitée
joue surtout le rôle d'amplificateur ou
d'accélérateur d'une thématique de recherche déjà
établie. - La découverte de pistes émergentes et leur
maturation se font principalement grâce aux
moyens récurrents des universités et des
organismes. - Nécessité de conserver un équilibre entre les
financements récurrents et les financements sur
projets. - Nécessité dattribuer des préciputs importants
(11 pour lANR contre 50 en moyenne à la NSF).
19Evaluation de la recherchedans le contexte
international
- AERES choix dune évaluation nationale
universelle et centralisée. - USA Evaluation nationale indirecte par la NSF.
- Lattribution de grants vaut évaluation
favorable de ceux qui les reçoivent. Cest une
évaluation indirecte qui porte sur la capacité
dun chercheur ou dune équipe à attirer des
financements.
20Evaluation de la recherchedans le contexte
international
- Grande-Bretagne Le Research Assessment Exercise
(RAE) qui a lieu tous les 4 à 6 ans, est une
évaluation de la recherche des départements de
toutes les universités. Ses résultats sont
utilisés pour répartir les crédits récurrents. - Le RAE a fonctionné jusquici sur la méthode de
la peer review. - Exercice jugé trop lourd pour ceux qui le font et
pour ceux qui le subissent, se traduisant par des
variations mineures de crédits. - Le RAE devrait être remplacé par un exercice
dévaluation basé sur des indicateurs de
performance, ce qui provoque beaucoup
doppositions.
21LAERES dans la réforme
- LAERES, confrontée à limmensité de la tâche qui
lui incombe, devra immanquablement adopter des
méthodes réalistes . - Quel équilibre entre évaluation sur indicateurs
de performance et peer review ? - Nécessité pour chaque établissement de mettre en
œuvre des procédures fiables dauto-évaluation,
en complément de lévaluation nationale, pour
déterminer sa stratégie.
22Lautonomie des universitésdans le contexte
international
- Jusquici il ny a jamais eu de véritables
universités en France (comparables aux
universités anglo-saxonnes qui sont devenues un
modèle international). - Il paraît indispensable de passer à une
organisation plus décentralisée où les
universités jouissent dune plus grande
autonomie . - Toute la question est de savoir si les
universités vont être capables dassumer cette
autonomie et, notamment, de devenir des
opérateurs de recherche à part entière.
23Lautonomie des universités
- La question des moyens lautonomie des
universités (et leur capacité à être opérateurs
de recherche) restera illusoire si celles-ci ne
disposent pas de marges de manœuvre financières
significatives. - La question de la gouvernance les imperfections
de la LRU et les conditions souvent chaotiques de
son application suscitent des inquiétudes qui
poussent beaucoup à se cramponner aux acquis
organisationnels du pilotage actuel par le CNRS. - Mais il faut savoir si, à moyen terme, on
travaille à lavènement de véritables universités
en France.
24Lautonomie des universités
- Toute entreprise de décentralisation comporte de
grandes incertitudes dans la mesure où lon
abandonne des pratiques normalisées et éprouvées
pour des pratiques à inventer dans un cadre plus
flou, soumis à la pression des intérêts locaux. - Il y a un pari à faire sur la confiance accordée
et sur la responsabilité des acteurs.
25Lautonomie des universités
- Lautonomie universitaire progresse à petits pas
et la politique universitaire territoriale avance
dans plusieurs régions. - Il faut préserver la qualité du recrutement des
jeunes chercheurs. - Les procédures de recrutement universitaires ne
méritent pas un discrédit global, mais les
universités se différencient de plus en plus dans
leurs missions et, en conséquence, dans leurs
critères de recrutement.
26De quelques enjeux
- Il est important de maintenir un flux de
recrutement au plus haut niveau scientifique. La
formule des chaires CNRS (avec recrutement
conjoint par une université et par le CNRS) peut
être une solution.
27De quelques enjeux
- Attention à la stratégie libéral-colbertiste
qui, dun coté, organise la décentralisation de
la recherche autour des universités et, de
lautre, entend piloter centralement la recherche
par une agence de programmes, dinspiration
technocratique. - Le nouveau CNRS pourrait être un instrument
utile, en attribuant ses moyens de façon moins
ponctuelle que lANR, prenant en compte, sur la
durée, lévolution des laboratoires et des
disciplines.
28En guise de conclusion
- Il faut traverser la rivière à gué, en
sautant dune pierre sur lautre - (Den Xiaoping, à propos de la réforme en Chine)