Title: LE SECTEUR
1LE SECTEUR
- Lhistoire sans fin
-
-
DR LAVAUD -
Psychiatre des hôpitaux -
Chef du pôle 94G10 -
23 octobre 2012 -
Groupe 3 -
Pacte de confiance
2Le secteur correspond à une aire géographique
dont la taille est définie par la population qui
y réside. (Environ 70000 habitants pour un
secteur adulte, un secteur infanto juvénile pour
trois secteurs adultes)
- Il existe 4 critères
- Géographique.
- Nosographique.
- De politique sanitaire (prévention,
soins, postcure). - Equipe pluridisciplinaire.
- Chaque secteur est placé sous lautorité dun
médecin psychiatre à la tête dune équipe
pluridisciplinaire. - Le secteur assure le dépistage précoce, la
prophylaxie, la cure et la postcure des maladies
mentales, de lalcoolisme et de la toxicomanie.
3- La politique de secteur nest pas seulement une
forme originale dorganisation sanitaire, elle
implique une modification profonde de lattitude
de la société à légard des malades mentaux
(MIGNOT 1961). - Le concept remonte aux débats des journées
nationales de la psychiatrie française tenues
entre 1945 et 1947. - Lambiance de la libération a permis dexprimer
clairement le caractère de conduite punitive de
la mesure dinternement (BONNAFE 1947).
4A) Lhistoire des asiles
- PINEL, ESQUIROL et PARCHAPPE sont trois noms qui
jalonnent lhistoire et le début des institutions
psychiatriques. - PINEL (1745-1826) a fait reconnaître les malades
mentaux (ils étaient auparavant maintenus avec
les indigents). Traité médico philosophique sur
laliénation mentale (1800) - ESQUIROL (1772-1840) a défendu la valeur des
traitements pratiqués dans les maisons de santé
authentifiant leur rôle proprement médical. Des
maladies mentales considérées sous les rapports
médical, hygiénique et moral (1838) - PARCHAPPE (1787-1866) est plutôt un
administrateur. Il a survécu à lhistoire
essentiellement en tant quinspecteur général qui
organisa les institutions et établissements de
santé .
5- Il ny a jamais eu dâge dor des asiles
psychiatriques. Ces institutions publiques ont
été imposées aux collectivités départementales
(1838) qui furent mises dans lobligation
dériger des maisons de santé pour recevoir,
traiter et entretenir les aliénés. - La quasi-totalité dentre eux étaient des
indigents entièrement à la charge de ces
collectivités. - Dans la majorité des cas, le confort hôtelier et
la prise en charge réadaptative allaient de pair
avec la paie lamentable des gardiens qui y
travaillaient avec un statut de domestique. - Les rapports dinspection générale ont dénoncé
les conditions dinstallation et de
fonctionnement de ces installations (célèbre
rapport de Sérieux en 1903). - Entre 1870 et 1914, la situation se dégrade en
même temps que se développent les thèses
mécanicistes, sur la dégénérescence et la
biotypologie des malades mentaux. (Thèses à la
limite du racisme)
6- Avant 1914 création des premiers dispensaires
dhygiène mentale souvent regroupés dans des
dispensaires dhygiène sociale (lutte contre les
maladies mentales, la tuberculose et les maladies
vénériennes) - 1920 Création dune nouvelle société
scientifique lévolution psychiatrique - 1936 création de la profession dinfirmier
psychiatrique - 1938 les asiles deviennent des hôpitaux
7B) Une évolution devenue obligatoire
- 1940 la défaite de 1940 est le coup de grâce
pour le système asilaire (les exterminations
nazies des juifs avaient été précédées par celles
des vieillards dhospice, des incurables et
surtout des aliénés). - Lalimentation des pensionnaires des asiles
navait pas été prévue dans le système national
de rationnement. - 40 de leffectif des aliénés internés mourra
avant la fin de la guerre en 1945. - Après la libération, les médecins des asiles
définirent comme but la mise sur pied dun
système de rechange à celui de lasile et de
linternement, durant les journées nationales de
1945 à 1947 ils définissent alors les buts et
les méthodes.
8C) Une longue mise en route
- Ce qui est remis en cause dès 1945 cest le
principe même de linstitution psychiatrique. - La première résolution lunicité et
lindivisibilité de la prophylaxie, de la cure et
de la post cure . - Sortir dun système dassistance et passer à une
stratégie de projets thérapeutiques individuels. - Refus de la ségrégation, de lexclusion aider
le malade mental à garder sa place dans la
communauté des hommes et lui permettre dans la
mesure du possible dy restaurer son autonomie.
9- A partir des années 1950 limpact de la
psychopharmacologie (Neuroleptiques, puis Anti
dépresseurs et tranquillisants) a transformé
latmosphère des institutions psychiatriques en
reléguant les moyens de contention
traditionnelle, les techniques de choc physiques
ou chimiques. - Cet impact a rencontré le désir dhumanisation et
abouti au concept dhôpital village
(psychothérapie institutionnelle, sociothérapie,
promenades, lieux de culte, de travail,
culturels, sportifs, clubs, associations) - Le nombre de malades hospitalisés a diminué,
sorties, réinsertions familiales, sociales,
professionnelles.
10- Essor considérable des consultations de
dispensaire, lhôpital changeait de rythme et
redevenait un lieu de soins. - Les hospitalisations libres se sont multipliées,
lopinion du malade mental devenait recevable,
par ex sortie contre avis médical. - La psychothérapie institutionnelle signait
lentrée des thèses freudiennes dans les lieux
dhospitalisation. - Cest la 3ème révolution des hôpitaux
psychiatriques ergo/sociothérapie,
pharmacothérapie, psychothérapie.
11En 1960 ladministration centrale prend une
première mesure réglementaire (circulaire du 15
mars sur le secteur).
- La circulaire du 15 mars 1960 est à lorigine de
la naissance du secteur. - Principes
- Organisation de la lutte contre les maladies
mentales. - Séparer le moins possible le malade de sa
famille et de son milieu. -
- Objectifs
- Assurer des soins de qualités au plus près
des personnes. - Eviter lhospitalisation ou la
ré-hospitalisation. - Améliorer les conditions dhospitalisation.
12UNE LONGUE MARCHE
- Entre 1965 1967 le livre blanc de la
psychiatrie fait le point. (Sur labsence
quasi-totale de réalisation de la sectorisation à
part quelques cas isolés.) - Après 1968 les premiers textes réglementaires
commencèrent à être rédigés
13La fin des directions médicales
- La fonction du médecin directeur était, en règle
générale, applicable à tous les hôpitaux
psychiatriques. En 1970, cette fonction fut
considérée comme en voie dextinction, en 1974,
il y fut mis fin. - Des fonctionnaires dadministration furent nommés
directeurs source ici et là de situations
conflictuelles. - La plupart des pays ont 1 direction médicale ou
collégiale médico administrative - La gestion des soins psychiatriques était une
affaire trop sérieuse
14La doctrine du secteur procède dun double
mouvement de réflexion.
- Le constat critique de la situation des
institutions au regard des impératifs de soins. - La nécessaire continuité des soins aux malades
hospitalisés ou non et lorganisation de soins
primaires. - La réforme des hôpitaux impliquait de mettre sur
pied dautres formules soignantes
institutionnelles extra hospitalières et non
institutionnelles. - On passait dune pratique dassistance à une
pratique de soins. - Les problèmes gestionnaires et la logique
hospitalocentrique ont ralenti ou modifié des
projets de soins.
15- La diminution du taux doccupation des hôpitaux
psychiatriques obère lenveloppe consacrée aux
soins et à la santé. - On demande au secteur de compenser le manque à
gagner et il y a tendance à ériger dans le
secteur des structures du type de celles qui
rapportent un prix de journée. - Les patients chroniques prennent une place
relative plus importante à lhôpital quand les
durées de séjour diminuent et que les prix de
journées augmentent. - La situation est extraordinairement différente
dun secteur à lautre, dun département à
lautre. - Le secteur et ses activités nouvelles sont gérées
par les services déconcentrés de létat
cest-à-dire les DASS
16Deux logiques antagonistes
- La gestion de lhôpital dont les taux
doccupation baissent et la part de patients
chroniques augmente. - La gestion extra hospitalière avec multiplication
des consultations, visites à domicile, activités
de jour ambulatoires, appartements
thérapeutiques, dont lefficacité aggrave la
situation de lhôpital. - Un contrôle difficile de cette activité
extrahospitalière qui échappe au regard et un
certain degré de méfiance.
17- La doctrine du secteur remet en cause
linstitution asilaire dont la critique a
commencé dès le 19ème siècle. - Ce concept a émergé dans un contexte conflictuel
du fait de la bureaucratie gestionnaire. - Linnovation nécessaire est difficile, les
métiers changent, les partenaires aussi.
18- Ce nest quà partir des années 1980 que la
sectorisation se met en place avec des succès
plus ou moins importants selon les établissements
et les départements. - Rappelons le discours de Sotteville les Rouen du
ministre Ralite en 1981. - En 1985 nouvelle loi et circulaire sur le secteur
(légalisation du secteur et organisation des
soins confiée aux établissements hospitaliers),
donc unicité de gestion intra/extrahospitalier
par la direction de lhôpital ( les DASS géraient
auparavant lextra hospitalier favorisant ici et
là les projets innovants.) - La reprise de la gestion par ladministration
hospitalière faisait craindre le retour à
lhospitalocentrisme ce qui sest souvent avéré
exact avec diminution pour les secteurs les plus
engagés des moyens de lextrahospitalier . -
19- Larrêté du 14 Mars 1986 concerne les équipements
et services de lutte contre les maladies mentales
avec ou non possibilité dhospitalisation. - LArrêté du 14 Octobre 1986 définit les Unités
pour Malades Difficiles (U.M.D.). - La Circulaire du 14 Mars 1990 (Evin) réaffirme
les principes de la sectorisation et la
coordination des soins avec le personnel soignant
ne travaillant pas dans un milieu psychiatrique. - Elle détaille les organisations, cest le
document le plus détaillé et abouti sur
lorganisation des soins ambulatoires et des
structures innovantes de soins et de concertation
avec les acteurs du médico social.. - La loi de 1990 qui réforme la loi de 1838
régissant les modalités dhospitalisation (voulue
pour le bicentenaire de la révolution de 1789)
20- La loi HPST 2010 réorganise les hôpitaux et leur
gouvernance dans une logique territoriale qui ne
prend pas en compte spécifiquement la
psychiatrie, la sectorisation et sa logique
territoriale propre nest plus affirmée. - Attente dune loi dorientation sur la santé
mentale - Discours dAntony et loi de juillet 2011
régissant les hospitalisations sous contrainte et
organisant lobligation de soins ambulatoire
21Des logiques médicales et gestionnaires souvent
antagonistes
- Le développement des activités de secteur réduit
la part de lhospitalisation les patients
aigus restent moins longtemps, les patients
au long cours sont orientés vers des structures
médico sociales qui se créent avec les médecins
et souvent à leur initiative. - Les partenariats se nouent avec dautres
interlocuteurs institutionnels ou associatifs
MAS, FAM, Résidences accueils, maisons relais,
SAVS,SAMSAH, conseils locaux de santé mentale. - Le développement de lactivité de liaison,
larticulation avec le médicosocial, la prise en
compte des parcours de soins, les unités mobiles,
la prise en charge de la précarité, les relations
avec les élus, les familles et usagers pour la
création de structures adaptées se font dans le
cadre des activités sectorielles souvent dans
lindifférence ou la méconnaissance des équipes
gestionnaires hospitalières. - Il faut noter que ces projets se construisent pas
à pas sur plusieurs années et que le temps
médical et administratif nest pas le même la
rotation rapide des uns explique sans doute en
partie les difficultés de travail commun
22Des incompréhensions
- Lactivité se déplace hors des murs de lhôpital
sans que les moyens et les redéploiements ne
suivent. - La lourdeur de linstitution hospitalière ne
permet pas la souplesse et ladaptation
nécessaires. - La part relative des services généraux et
administratifs augmente avec de nouveaux métiers,
chargés de communication, sécurité. - La logique sécuritaire aboutit à développer les
moyens de lhôpital avec renforcement du
renfermement, unités fermées qui deviennent la
règle pour tous les patients restriction de la
liberté daller et venir contrôle des entrées
pour les visiteurs, agents de surveillance.. - Cest le retour à la stigmatisation régulièrement
dénoncée, le terme de schizophrénie devient
synonyme de dangerosité - Des logiques nouvelles de communauté
hospitalières avec gestion des repas et du linge
de plusieurs établissements orientant les
investissements vers une logique qui nest pas
que soignante mais de lhôpital entreprise
23La psychiatrie représente environ un tiers des
lits dhospitalisation en France
- La situation est différente entre les secteurs de
psychiatrie des établissements publics de santé
(les anciens CHS ou asiles) et les secteurs de
psychiatrie implantés progressivement depuis les
années 1970-1980 à lhôpital général. - Les secteurs de psychiatrie à lhôpital général
représentent actuellement environ un tiers de
lensemble. - Il y a environ 1000 secteurs en France
(adultes/infanto juvéniles) - La situation des CHU est à part tous les services
ne sont pas sectorisés
24Dans les hôpitaux généraux la situation est pire
- Le secteur na jamais pu vraiment se développer
et les moyens sont orientés vers dautres
disciplines. - Labsence de structures extrahospitalières est
souvent la règle. - La dé stigmatisation souhaitée et la banalisation
des soins trouvent leurs limites dans la pauvreté
des alternatives à lhospitalisation limitées
bien souvent à un CMP
25Dans ce contexte la loi HPST est vécue comme
aggravante par les médecins
- Déresponsabilisation (budgets, choix stratégiques
et médicaux, gestion des personnels) - Problème pôle /secteur.
- Laffirmation récurrente du nécessaire
regroupement des secteurs en pôle est vécue
comme une négation du secteur dont lactivité est
méconnue dans son aspect institutionnel et
relationnel aux détriments dune logique purement
hospitalière ou hospitalocentrée. - Dautant que les délégations de gestion
sont quasi inexistantes quelle que soit la taille
du pôle (mais pourquoi un médecin qui serait
incompétent pour gérer un hôpital le serait il
pour gérer un pôle et ce dautant plus que la
taille du pôle serait importante regroupant
parfois presque tous les secteurs!) - Les querelle stériles sont chronophages et
démobilisatrices. - Dans un contexte de grandes difficultés de
recrutement liées à leffondrement de la
démographie médicale, ces querelles et problèmes
font leffet dun repoussoir chez les jeunes
collègues que nous accueillons et qui manifestent
le souci de pouvoir travailler et développer les
modes de soins les plus adaptées dans un climat
de sérénité où lactivité soignante serait
lessentiel de leur préoccupation (comme pour les
infirmiers dailleurs qui ont maintenant un
diplôme unique). -
26Une charge et lourdeur administrative de plus en
plus importante
- Le travail administratif est mal vécu par le
personnel soignant intrusif et chronophage, il
lempêche de se consacrer à son cœur de métier,
la relation au patient. Pour les participants au
colloque Prendre soin du travail organisé le
12 octobre par lEHESP, il est temps de traiter
sérieusement ce sujet. - Multiplication des groupes, comités, dossier
patient informatisé, transmissions, visites de
certification.Alors que les effectifs ne cessent
de baisser et lactivité augmenter, le lien avec
la formation se distend et le fossé se creuse
entre les aspirations professionnelles et le
travail de terrain. - La finalité et lefficacité de ce travail
bureaucratique napparaissent pas clairement on
névalue plus la qualité et son amélioration mais
léchelle de qualité et le protocole!
27Des paradoxes
- Des médecins directeurs et une lenteur au
démarrage de la sectorisation en rapport avec des
moyens insuffisants, temps médicaux notamment. - Des directeurs administratifs et une politique de
secteur difficile à accompagner dans sa logique
puisquà terme cest la disparition ou en tout
cas la forte réduction du périmètre hospitalier
qui était en germe dans la logique du secteur.
28HPST
- Contrairement à son intitulé qui fait référence à
une logique de territoire, la psychiatrie nest
pas au programme! Seule discipline à avoir
intégré une logique de territoire de longue date. - La logique de santé publique non plus qui permet
dorganiser loffre de soins sur un territoire en
complémentarité public/privé/associatif et
permettrait éventuellement de réorienter loffre
en tenant compte de ces critères, de la
démographie, de la situation sociale - Des logiques de contournement utiliser les PRS
et leur déclinaison départementale pour faire
avancer les projets de développement sectoriels
ou de liaisons avec le médicosocial et les
parcours de soins
29Pacte de confiance
- Des acteurs condamnés à sentendre.
- Des rivalités qui nauraient pas lieu dêtre.
- Des compétences différentes
- Un respect mutuel des prérogatives de chacun
- Des luttes de pouvoir et dinfluence anciennes
qui devraient être dépassées - Des modifications doivent être apportées qui
rétablissent cette confiance indispensable en
rééquilibrant les pouvoirs comme cest le cas
dans toutes les institutions et qui ne devraient
pas reposer sur la bonne volonté des uns ou des
autres comme cest le cas dans les établissements
qui fonctionnent bien. - Lhôpital sans médecin ça va marcher beaucoup
moins bien 40 des psychiatres partiront en
retraite dans les 5 ans en Ile de France