Title: Mots d
1Mots damour !
2 Pour toi mon amourJe suis allé au marché aux
oiseauxEt j'ai acheté des oiseauxPour toiMon
amourJe suis allé au marché aux fleursEt j'ai
acheté des fleursPour toiMon amourJe suis allé
au marché à la ferrailleEt j'ai acheté des
chaînesDe lourdes chaînesPour toiMon amourEt
je suis allé au marché aux esclavesEt je t'ai
cherchéeMais je ne t'ai pas trouvéeMon
amourJacques Prevert
3Il n'y a pas d'amour heureux
- Rien n'est jamais acquis à l'homme Ni sa
forceNi sa faiblesse ni son coeur Et quand il
croitOuvrir ses bras son ombre est celle d'une
croixEt quand il croit serrer son bonheur il le
broieSa vie est un étrange et douloureux
divorceIl n'y a pas d'amour heureuxSa vie Elle
ressemble à ces soldats sans armesQu'on avait
habillés pour un autre destinA quoi peut leur
servir de se lever matinEux qu'on retrouve au
soir désoeuvrés incertainsDites ces mots Ma vie
Et retenez vos larmesIl n'y a pas d'amour
heureuxMon bel amour mon cher amour ma
déchirureJe te porte dans moi comme un oiseau
blesséEt ceux-là sans savoir nous regardent
passerRépétant après moi les mots que j'ai
tressésEt qui pour tes grands yeux tout aussitôt
moururent
- Il n'y a pas d'amour heureuxLe temps
d'apprendre à vivre il est déjà trop tardQue
pleurent dans la nuit nos coeurs à l'unissonCe
qu'il faut de malheur pour la moindre chansonCe
qu'il faut de regrets pour payer un frissonCe
qu'il faut de sanglots pour un air de guitareIl
n'y a pas d'amour heureuxIl n'y a pas d'amour
qui ne soit à douleurIl n'y a pas d'amour dont
on ne soit meurtriIl n'y a pas d'amour dont on
ne soit flétriEt pas plus que de toi l'amour de
la patrieIl n'y a pas d'amour qui ne vive de
pleursIl n'y a pas d'amour heureuxMais c'est
notre amour à tous les deux - Louis Aragon (La Diane Francaise, Seghers
1946)
4Je vis, je meursJe vis, je meurs je me brûle
et me noie.J'ai chaud extrême en endurant
froidure La vie m'est trop molle et trop
dure.J'ai grand ennuis entremêlés de joie
Tout à coup je ris et je larmoie,Et en
plaisir maint grief tourment j'endure Mon bien
s'en va, et à jamais il dure Tout en un coup je
sèche et je verdoie.Ainsi Amour inconstamment
me mène Et quand je pense avoir plus de
douleur,Sans y penser je me trouve hors de
peine.Puis, quand je crois ma joie être
certaine,Et être au haut de mon désiré heur,Il
me remet en mon premier malheur.Louise
LabéSonnets, V111La mer et l'amour
5Le Pont Mirabeau Sous le pont Mirabeau coule la
Seine           Et nos amours      Faut-il
qu'il m'en souvienneLa joie venait toujours
après la peine     Vienne la nuit sonne
l'heure    Les jours s'en vont je demeure Les
mains dans les mains restons face Ã
face           Tandis que sous      Le pont
de nos bras passeDes éternels regards l'onde si
lasse     Vienne la nuit sonne l'heure   Â
Les jours s'en vont je demeure L'amour s'en va
comme cette eau courante           L'amour s'en
va      Comme la vie est lenteEt comme
l'Espérance est violente     Vienne la nuit
sonne l'heure    Les jours s'en vont je
demeure Passent les jours et passent les
semaines           Ni temps passé       Ni
les amours reviennentSous le pont Mirabeau coule
la Seine     Vienne la nuit sonne l'heure   Â
Les jours s'en vont je demeure Guillaume
Apollinaire (1880 - 1918)
6A une passante La rue assourdissante autour de
moi hurlait. Longue, mince, en grand deuil,
douleur majestueuse, Une femme passa, d'une main
fastueuse Soulevant, balançant le feston et
l'ourlet  Agile et noble, avec sa jambe de
statue. Moi, je buvais, crispé comme un
extravagant, Dans son oeil, ciel livide où germe
l'ouragan, La douceur qui fascine et le plaisir
qui tue.  Un éclair... puis la nuit!
Fugitive beauté Dont le regard m'a fait
soudainement renaître, Ne te verrai-je plus que
dans l'éternité?  Ailleurs, bien loin d'ici!
trop tard! jamais peut-être! Car j'ignore où tu
fuis, tu ne sais où je vais, O toi que j'eusse
aimée, ô toi qui le savais! Charles Baudelaire
7Et la mer et l'amour ont la mer pour partageEt
la mer est amère, et l'amour est amer.L'on
s'abîme en la mer aussi bien qu'en l'amour,Car
l'amour et la mer ne sont point sans orage.Celui
qui craint les eaux, qu'il demeure au
rivage.Celui qui craint les maux qu'on souffre
pour aimerqu'il ne se laisse pas par l'amour
emporterCar tous deux ils seraient sans hasard
de naufrageLa mer de l'amour eut la mer pour
berceau,Le feu sort de l'amour, sa mère sort de
l'eau.Mais l'eau contre ce feu ne peut fournir
des armes.Si l'eau pouvait éteindre un brasier
amoureux,Ton amour qui me brûle est si fort
douloureux,Que j'eusse éteint son feu de la mer
de mes larmes... Pierre de Marbeuf
8SensationArthur RIMBAUD Par les soirs bleus
d'été, j'irai dans les sentiersPicoté par les
blés, fouler l'herbe menueRêveur, j'en sentirai
la fraîcheur à mes pieds.Je laisserai le vent
bainger ma tête nue.Je ne parlerai pas, je ne
penserai à rienMais l'amour infini me montera
dans l'âme,Et j'irai loin, bien loin, comme un
bohémien,Par la nature, - heureux comme avec une
femme
9A ma maitresse Mignonne, allons voir si la rose
Qui se matin avoit déclose Sa robe de pourpre
au Soleil, A point perdu ceste vesprée Les plis
de sa robe pourprée, Et son teint au vostre
pareil. Las ! voyez comme en peu d'espace,
Mignonne, elle a dessus la place Las las ses
beautez laisse cheoir ! O vrayment marastre
Nature, Puis qu'une telle fleure ne dure Que du
matin jusques au soir ! Donc, si vous me croyez
mignonne, Tandis que vostre age fleuronne En sa
plus verte nouveauté, Cueillez cueillez vostre
jeunesse Comme à ceste fleure la vieillesse
Fera ternir vostre beauté.  Pierre de Ronsard
("Le Premier Livre des Odes, Ode XVII")
10Harmonie du soir. Voici venir les temps où
vibrant sur sa tigeChaque fleur s'évapore ainsi
qu'un encensoirLes sons et les parfums tournent
dans l'air du soirValse mélancolique et
langoureux vertige!Chaque fleur s'évapore ainsi
qu'un encensoirLe violon frémit comme un cœur
qu'on affligeValse mélancolique et langoureux
vertige!Le ciel est triste et beau comme un
grand reposoir.Le violon frémit comme un cœur
qu'on afflige,Un cœur tendre, qui hait le néant
vaste et noir!Le ciel est triste et beau comme
un grand reposoirLe soleil s'est noyé dans son
sang qui se fige.Un cœur tendre, qui hait le
néant vaste et noir,Du passé lumineux recueille
tout vestige!Le soleil s'est noyé dans son sang
qui se fige Ton souvenir en moi luit comme un
ostensoir!Baudelaire, Les fleurs du mal XLIII
11Georges Brassens   La non-demande en mariage
- Ma mie, de grâce, ne mettonsPas sous la gorge Ã
CupidonSa propre flècheTant d'amoureux l'ont
essayéQui, de leur bonheur, ont payéCe
sacrilège...RJ'ai l'honneur deNe pas te
de-mander ta mainNe gravons pasNos noms au
basD'un parcheminLaissons le champs libre Ã
l'oiseauNous seront tous les deux priso-nniers
sur paroleAu diable les maîtresses queuxQui
attachent les cœurs aux queuesDes
casseroles!Vénus se fait vielle souventElle
perd son latin devantLa lèchefriteA aucun prix,
moi je ne veuxEffeuiller dans le pot-au-feuLa
marguerite
- On leur ôte bien des attraitsEn dévoilant trop
les secretsDe MélusineL'encre des billets doux
pâlitVite entre les feuillets des li-vres de
cuisine.Il peut sembler de tout reposDe
mettre à l'ombre, au fond d'un potDe
confitureLa jolie pomme défendueMais elle est
cuite, elle a perduSon goût "nature"De
servante n'ai pas besoinEt du ménage et de ses
soinsJe te dispenseQu'en éternelle fiancéeA la
dame de mes penséesToujours je pense
12- Les Yeux d'Elsa Tes yeux sont si
profonds qu'en me penchant pour boire J'ai vu
tous les soleils y venir se mirer S'y jeter Ã
mourir tous les désespérés Tes yeux sont si
profonds que j'y perds la mémoire À l'ombre des
oiseaux c'est l'océan troublé Puis le beau temps
soudain se lève et tes yeux changent L'été
taille la nue au tablier des anges Le ciel n'est
jamais bleu comme il l'est sur les blés Les
vents chassent en vain les chagrins de l'azur
Tes yeux plus clairs que lui lorsqu'une larme y
luit Tes yeux rendent jaloux le ciel d'après la
pluie Le verre n'est jamais si bleu qu'Ã sa
brisure Mère des Sept douleurs ô lumière
mouillée Sept glaives ont percé le prisme des
couleurs Le jour est plus poignant qui point
entre les pleurs L'iris troué de noir plus bleu
d'être endeuillé Tes yeux dans le malheur
ouvrent la double brèche Par où se reproduit le
miracle des Rois Lorsque le coeur battant ils
virent tous les trois Le manteau de Marie
accroché dans la crèche
- Une bouche suffit au mois de Mai des mots
Pour toutes les chansons et pour tous les hélas
Trop peu d'un firmament pour des millions
d'astres Il leur fallait tes yeux et leurs
secrets gémeaux L'enfant accaparé par les
belles images Écarquille les siens moins
démesurément Quand tu fais les grands yeux je ne
sais si tu mens On dirait que l'averse ouvre des
fleurs sauvages Cachent-ils des éclairs dans
cette lavande où Des insectes défont leurs
amours violentes Je suis pris au filet des
étoiles filantes Comme un marin qui meurt en mer
en plein mois d'août J'ai retiré ce radium de
la pechblende Et j'ai brûlé mes doigts à ce feu
défendu Ô paradis cent fois retrouvé reperdu
Tes yeux sont mon Pérou ma Golconde mes Indes
Il advint qu'un beau soir l'univers se brisa
Sur des récifs que les naufrageurs enflammèrent
Moi je voyais briller au-dessus de la mer Les
yeux d'Elsa les yeux d'Elsa les yeux d'Elsa
Louis Aragon Extrait de "Les Yeux d'Elsa"
13Georges Brassens dans l'eau de la claire
fontaine
- Dans l'eau de la claire fontaineElle se baignait
toute nueUne saute de vent soudaineJeta ses
habits dans les nuesEn détresse, elle me fit
signePour la vêtir, d'aller chercherDes
monceaux de feuilles de vigneFleurs de lis ou
fleurs d'orangerAvec des pétales de rosesUn
bout de corsage lui fisLa belle n'était pas bien
grosseUne seule rose a suffi
- Avec le pampre de la vigneUn bout de cotillon
lui fisMais la belle était si petiteQu'une
seule feuille a suffiElle me tendit ses bras,
ses lèvresComme pour me remercierJe les pris
avec tant de fièvreQu'ell' fut toute
déshabilléeLe jeu dut plaire à l'ingénueCar, Ã
la fontaine souventEll' s'alla baigner toute
nueEn priant Dieu qu'il fit du ventQu'il fit du
vent...
14Plaintes d'amoureux Nul hom ne peut souffrir
plus de tourmentQue j'ai pour vous, chère dame
honorée,Qui chaque jour êtes en ma pensée Se il
vous plaît, je vous dirai comment,Car loin de
vous ai vie désespéréeNul hom ne peut souffrir
plus de tourmentQue j'ai pour vous, chère dame
honorée, Mais Faux-Rapport vous a dit
faussementQue j'aime ailleurs C'est fausseté
prouvéeJe n'aime fors vous, et sachez, belle
née,Nul hom ne peut souffrir plus de
tourmentQue j'ai pour vous, chère dame
honorée,Qui chaque jour êtes en ma pensée
Deschamps
15PAUL VERLAINE 1844 - 1896 Green Voici des
fruits, des fleurs, des feuilles et des branches
Et puis voici mon coeur qui ne bat que pour
vous. Ne le déchirer pas avec vos deux mains
blanches Et qu'à vos yeux l'humble présent soit
doux. J'arrive tout couvert encore de rosée Que
le vent du matin vient glacer à mon front.
Souffrez que ma fatigue à vos pieds repose Rêve
des chers instants qui la délasseront. Sur votre
jeune sein laissez rouler ma tête Toute sonore
encore de vos derniers baisers Laissez-la
s'apaiser de la bonne tempête, Et que je dorme
un peu puisque vous reposez
16L'amoureuseElle est debout sur mes paupières
Et ses cheveux sont dans les miens, Elle a la
forme de mes mains, Elle a la couleur de mes
yeux, Elle s'engloutit dans mon ombre Comme une
pierre sur le ciel. Elle a toujours les yeux
ouverts Et ne me laisse pas dormir. Ses rêves
en pleine lumière Font s'évaporer les soleils,
Me font rire, pleurer et rire, Parler sans
avoir rien à dire. Eluard
17DEMAIN, DÈS L'AUBE... - VICTOR HUGO Demain, dès
l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,Je
partirai. Vois-tu, je sais que tu
m'attends.J'irai par la forêt, j'irai par la
montagne.Je ne puis demeurer loin de toi plus
longtemps.Je marcherai les yeux fixés sur mes
pensées,Sans rien voir au dehors, sans entendre
aucun bruit,Seul, inconnu, le dos courbé, les
mains croisées,Triste, et le jour pour moi sera
comme la nuit.Je ne regarderai ni l'or du soir
qui tombe,Ni les voiles au loin descendant vers
Harfleur,Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta
tombeUn bouquet de houx vert et de bruyère en
fleur.
18Louis Aragon, "La rose et le Réséda"
- Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait
pas Tous deux adoraient la belle prisonnière des
soldats Lequel montait à l'échelle et lequel
guettait en bas - Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait
pas Qu'importe comment s'appelle cette clarté
sur leur pas Que l'un fut de la chapelle et
l'autre s'y dérobât - Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait
pas Tous les deux étaient fidèles des lèvres du
coeur des bras Et tous les deux disaient qu'elle
vive et qui vivra verra - Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait
pas Quand les blés sont sous la grêle fou qui
fait le délicat Fou qui songe à ses querelles au
coeur du commun combat - Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait
pas Du haut de la citadelle la sentinelle tira
Par deux fois et l'un chancelle l'autre tombe
qui mourra
- Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait
pas Ils sont en prison Lequel a le plus triste
grabat Lequel plus que l'autre gèle lequel
préfère les rats - Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait
pas Un rebelle est un rebelle deux sanglots font
un seul glas Et quand vient l'aube cruelle
passent de vie à trépas - Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait
pas Répétant le nom de celle qu'aucun des deux
ne trompa Et leur sang rouge ruisselle même
couleur même éclat - Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait
pas Il coule, il coule, il se mêle à la terre
qu'il aima Pour qu'à la saison nouvelle mûrisse
un raisin muscat - Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait
pas L'un court et l'autre a des ailes de
Bretagne ou du Jura Et framboise ou mirabelle le
grillon rechantera Dites flûte ou violoncelle le
double amour qui brûla L'alouette et
l'hirondelle la rose et le réséda Â
19J'ai tant rêvé de toi J'ai tant rêvé de toi que
tu perds ta réalité.Est-il encore temps
d'atteindre ce corps vivantEt de baiser sur
cette bouche la naissance De la voix qui m'est
chère? J'ai tant rêvé de toi que mes bras
habitués En étreignant ton ombreA se croiser
sur ma poitrine ne se plieraient pasAu contour
de ton corps, peut-être.Et que, devant
l'apparence réelle de ce qui me hanteEt me
gouverne depuis des jours et des années,Je
deviendrais une ombre sans doute.O balances
sentimentales. J'ai tant rêvé de toi qu'il n'est
plus tempsSans doute que je m'éveille.Je dors
debout, le corps exposéA toutes les apparences
de la vieEt de l'amour et toi, la seulequi
compte aujourd'hui pour moi,Je pourrais moins
toucher ton frontEt tes lèvres que les premières
lèvreset le premier front venu. J'ai tant rêvé
de toi, tant marché, parlé,Couché avec ton
fantômeQu'il ne me reste plus peut-être,Et
pourtant, qu'a être fantômeParmi les fantômes et
plus ombre Cent fois que l'ombre qui se
promèneEt se promènera allègrementSur le cadran
solaire de ta vie. Robert Desnos, "Corps et
biens".
20Romances sans paroles Il pleure dans mon
coeurComme il pleut sur la villeQuelle est
cette langueurQui pénètre mon coeur? O bruit
doux de la pluiePar terre et sur les toits!Pour
un coeur qui s'ennuieO le chant de la pluie! Il
pleure sans raisonDans ce coeur qui
s'écoeure.Quoi! Nulle trahison?...Ce deuil est
sans raison. C'est bien la pire peineDe ne
savoir pourquoiSans amour et sans haineMon
coeur a tant de peine! Paul Verlaine
21Victor HugoVieille chanson du jeune temps
- Je ne songeais pas à Rose Rose au bois vint
avec moi Nous parlions de quelque chose,Mais
je ne sais plus de quoi.J'étais froid comme les
marbres Je marchais à pas distraits Je
parlais des fleurs, des arbresSon oeil semblait
dire " Après ? "La rosée offrait ses
perles,Le taillis ses parasols J'allais
j'écoutais les merles,Et Rose les
rossignols.Moi, seize ans, et l'air morose
Elle, vingt ses yeux brillaient.Les
rossignols chantaient RoseEt les merles me
sifflaient.Rose, droite sur ses hanches,Leva
son beau bras tremblantPour prendre une mûre aux
branchesJe ne vis pas son bras blanc.
- Une eau courait, fraîche et creuse,Sur les
mousses de velours Et la nature
amoureuseDormait dans les grands bois
sourds.Rose défit sa chaussure,Et mit, d'un
air ingénu,Son petit pied dans l'eau pureJe ne
vis pas son pied nu.Je ne savais que lui dire
Je la suivais dans le bois,La voyant parfois
sourireEt soupirer quelquefois.Je ne vis
qu'elle était belleQu'en sortant des grands bois
sourds." Soit n'y pensons plus ! "
dit-elle.Depuis, j'y pense toujours.
22Jacques Brel   Quand on n'a que l'amour
- Quand on n'a que l'amourA s'offrir en partageAu
jour du grand voyageQu'est notre grand
amourQuand on n'a que l'amourMon amour toi et
moiPour qu'éclatent de joieChaque heure et
chaque jourQuand on n'a que l'amourPour vivre
nos promessesSans nulle autre richesseQue d'y
croire toujoursQuand on n'a que l'amourPour
meubler de merveillesEt couvrir de soleilLa
laideur des faubourgsQuand on n'a que
l'amourPour unique raisonPour unique chansonEt
unique secoursQuand on n'a que l'amourPour
habiller matinPauvres et malandrinsDe manteaux
de velours
- Quand on n'a que l'amourA offrir en prièrePour
les maux de la terreEn simple troubadourQuand
on n'a que l'amourA offrir à ceux-là Dont
l'unique combatEst de chercher le jourQuand on
n'a que l'amourPour tracer un cheminEt forcer
le destinA chaque carrefourQuand on n'a que
l'amourPour parler aux canonsEt rien qu'une
chansonPour convaincre un tambourAlors sans
avoir rienQue la force d'aimerNous aurons dans
nos mains,Amis le monde entier
23Correspondance amoureuse 02/03/2004George
Sand et Alfred de Musset
- George Sand Lettre de Georges Sand à Alfred de
Musset Cher ami,Je suis toute émue de vous dire
que j'aibien compris l'autre jour que vous aviez
toujours une envie folle de me faire danser. Je
garde le souvenir de votrebaiser et je voudrais
bien que ce soit une preuve que je puisse être
aiméepar vous. Je suis prête à montrer mon
affection toute désintéressée et sans cal-cul,
et si vous voulez me voir ainsi vous dévoiler,
sans artifice, mon âmetoute nue, daignez me
faire visite, nous causerons et en amis
franchement je vous prouverai que je suis la
femme sincère, capable de vous offrir
l'affection la plus profonde, comme la plus
étroite amitié, en un mot la meilleure épouse
dont vous puissiez rêver. Puisque votre âme est
libre, pensez que l'abandon ou je vis est bien
long, bien dur et souvent bien insupportable.
Mon chagrin est trop gros. Accourrez bien vite
et venez me lefaire oublier. À vous je veux me
sou-mettre entièrement.Votre poupée(seconde
lecture lire une ligne sur deux en commençant
par "Je suis toute émue")
- QUAND je mets à vos pieds un éternel hommage,
VOULEZ-vous qu'un instant je change de visage ?
VOUS avez capturé les sentiments d'un coeur QUE
pour vous adorer forma le créateur.JE vous
chéris, amour, et ma plume en délireCOUCHE sur
le papier ce que je n'ose dire.AVEC soin de mes
vers lisez les premiers mots VOUS saurez quel
remède apporter à mes maux. Alfred de Musset -
- CETTE insigne faveur que votre coeur réclame
NUIT à ma renommée et répugne à mon âme.
George Sand
24Merci Claire !